Un livreur de Jumia, à Lagos, en 2013. / PIUS UTOMI EKPEI / AFP

Elle avait déjà gagné le titre de première licorne africaine – surnom réservé aux start-up valorisées plus de 1 milliard de dollars (886 millions d’euros). La société de commerce en ligne Jumia projette désormais d’être la première entreprise technologique d’Afrique à s’introduire en Bourse aux Etats-Unis. Mardi 12 mars, elle a déposé son dossier en vue d’une entrée à Wall Street, au New York Stock Exchange (NYSE).

Le document ne précise pas le calendrier ni le prix de l’action attendu. Les détails financiers doivent désormais être discutés par les investisseurs et les banquiers. Pour Jumia, cette étape devrait constituer un jalon stratégique vers la maturité. Créé en 2012 par l’incubateur allemand Rocket Internet, le groupe aime à se présenter comme l’« Alibaba africain », en référence au géant chinois de l’e-commerce.

Etabli au Nigeria, il opère dans quatorze pays du continent et a déjà levé plus de 760 millions de dollars. Son tour de table, outre Rocket Internet, compte de grands noms des télécoms et de la finance, parmi lesquels Orange, l’opérateur sud-africain MTN ou la banque américaine Goldman Sachs.

93,8 millions d’euros de chiffre d’affaires

Travaillant avec plus de 80 000 vendeurs, Jumia s’est développé en misant sur une stratégie de conquête active des parts de marché. Avec un certain succès : le chiffre d’affaires a augmenté de plus de 11 % en 2017, à 93,8 millions d’euros. Et, en 2018, le site a dépassé les 750 millions de visites, en hausse de 36 %. Le groupe continue, en revanche, à afficher des pertes opérationnelles.

Il faut dire que cette place de marché, qui vend produits et services, doit jongler avec une certaine complexité. Dans une région en manque d’infrastructures, où la pénétration d’Internet reste faible et la population sous-bancarisée, l’entreprise a dû inventer son modèle. Elle a mis sur pied toute une chaîne logistique, développé son propre système de paiement, Jumia Pay, et accepté que les acheteurs règlent à la livraison.

« On a créé une infrastructure pour que tout cela fonctionne dans des pays où ce n’était pas évident, résume le Français Sacha Poignonnec, l’un des deux cofondateurs de la société avec Jérémy Hodara. Maintenant il faut croître plus rapidement. »

Aujourd’hui, l’e-commerce représente seulement 0,6 % des ventes de détail en Afrique, contre 12 % aux Etats-Unis et 20 % en Chine. Mais le potentiel est là, compte tenu d’un secteur de la distribution physique sous-développé et de la croissance exponentielle du marché du mobile. Selon Jumia, l’usage du smartphone a progressé de 70 % entre 2016 et 2017 sur le continent.