Luisa Neubauer, le 15 mars à Berlin. / CARSTEN KOALL / AFP

Elle refuse d’être nommée « la Greta Thunberg allemande », mais depuis quelques semaines, c’est bien elle qui s’est imposée comme la figure du mouvement Fridays for future (vendredis pour l’avenir) outre-Rhin. Luisa Neubauer, 22 ans, étudiante en géographie à Göttingen, est l’une des principales initiatrices des marches du vendredi en Allemagne, qui rassemblent chaque semaine depuis trois mois plusieurs milliers d’écoliers et étudiants.

Luisa Neubauer a rencontré la jeune Suédoise lors de la conférence sur le climat à Katowice, en Pologne, au mois de décembre 2018. Elle a aussitôt voulu copier l’initiative en Allemagne, mettant à profit plusieurs années d’engagement écologiste, mais aussi son éloquence, pour laquelle elle a gagné des concours au lycée. Au fur et à mesure des semaines, le mouvement a pris une forte ampleur : 190 groupes locaux y participent actuellement.

La première manifestation a lieu à Berlin, en décembre 2018. Le 25 janvier, plus de 5 000 jeunes se rassemblent dans la capitale, alors qu’au ministère de l’économie, la sortie du pays de l’énergie charbon est en passe d’être décidée. Vendredi 1er mars, Luisa Neubauer réussit un autre coup médiatique : Greta Thunberg s’associe à la marche de Hambourg. Sur les photos, on la voit défiler aux côtés de la jeune Allemande. Le lendemain, la chancelière Angela Merkel fait du mouvement l’objet de son podcast vidéo hebdomadaire, félicite les jeunes « pour leur engagement en faveur du climat. C’est une bonne initiative », déclare-t-elle.

« Même un engagement digne d’être soutenu doit se faire pendant le temps libre et ne justifie pas l’absentéisme »

Cet épisode a donné une légitimité supplémentaire à Luisa Neubauer et calmé les polémiques qui entourent le mouvement. Il y a d’abord la méthode employée : la grève scolaire est régulièrement qualifiée d’« école buissonnière ». Ce mode d’action est regardé avec suspicion dans un pays attaché au respect des règles, et où l’action collective est très encadrée. « Même un engagement digne d’être soutenu doit se faire pendant le temps libre et ne justifie pas l’absentéisme », a déclaré la ministre fédérale de l’éducation, Anja Karlicek.

Voyages en Afrique

Puis sont venues des critiques acerbes contre la personne de Luisa Neubauer. Au mois de février, un article de la Frankfurter Allgemeine Zeitung révélait que le compte Instagram de la jeune femme contenait des photos de séjours dans des régions lointaines, la Tanzanie, la Namibie, le Canada et la Grande-Bretagne, illustrant selon l’auteur l’écart entre le discours et la réalité vécue par de nombreux militants écologistes.

De quoi clouer au pilori des réseaux sociaux la jeune femme, qui depuis doit s’expliquer : ses voyages en Afrique sont liés à un engagement humanitaire en faveur du développement en Afrique. Elle précise qu’elle essaye de voler moins qu’avant. Mais elle s’insurge aussi contre les critiques sur les comportements personnels, qui détournent l’attention du niveau politique et structurel. « Beaucoup de gens plus âgés, en particulier ceux aux positions de pouvoir, se sont installés dans la crise climatique. Cette crise est aussi un conflit de génération », dit-elle dans le journal Süddeutsche Zeitung.