Le Bar Fondamental près de Pigalle à Paris, Terrabière implantée à Deuil-la-Barre, commune du Val-d’Oise, In Taberna à Monflanquin dans le Lot-et-Garonne, Bulle de Paradis en Champagne… Ce ne sont que quelques exemples de micro-brasseries créées en 2018. Qu’elles soient citadines, banlieusardes ou campagnardes, qu’elles vendent leur production à la ferme, à la brasserie ou dans un bar, elles fleurissent aux quatre coins de l’Hexagone.

En 2018, le flot de nouvelles microbrasseries n’a jamais été aussi fort. « Nous sommes passés en un an de 1 100 à 1 600 microbrasseries. En 2017, le rythme de créations était d’une tous les deux jours. Il a encore augmenté en 2018 et dépasse le seuil d’une par jour », affirme Maxime Costilhes, délégué général de Brasseurs de France.

Pour expliquer cet essor, M. Costilhes met en avant « l’engouement pour la bière », « la facilité d’installation puisqu’il n’y a pas d’obligation de titre ou de diplôme » ou « le désir d’avoir un revenu d’appoint ». En effet, dans certains cas, des agriculteurs franchissent le pas pour bénéficier d’une activité complémentaire.

Un syndicat indépendant

Un phénomène qui touche même les viticulteurs. A l’exemple de David Nicolo, à la tête de la maison de champagne Nicolo et Paradis à Arsonval (Aube), qui a choisi de passer des bulles à la mousse en 2018 avec le lancement de sa marque brassicole Bulle de Paradis.

Afin de défendre leurs intérêts, les microbrasseurs ont même choisi de se regrouper et de fonder le Syndicat national des brasseurs indépendants (SNBI), qui revendique 400 membres. Même si certains sont aussi présents au sein de Brasseurs de France où règnent les géants de la bière. En effet, malgré l’arrivée de ces nouveaux-venus, le marché français de la bière reste dominé de la tête et des épaules par le néerlandais Heineken et par Kronenbourg, filiale du groupe danois Carlsberg. « En 2017, les microbrasseries pesaient 5 % à 6 % du marché en volume et 7 % en valeur », précise M. Costilhes.

Heineken et Kronenbourg profitent d’ailleurs du regain de dynamisme des ventes. D’autant qu’en 2018, la Coupe du monde de football et les chaleurs caniculaires ont incité les consommateurs à s’offrir une tournée supplémentaire. « Le marché de la bière en France a progressé de 4,2 % en volume en 2018, la plus forte croissance depuis six ans », estimé Pascal Sabrié, président d’Heineken France.

Les géants adaptent leur offre

La filiale du néerlandais (Heineken, Desperados, Pelforth, Affligem, Edelweiss) se targue d’une progression de ses volumes de 4 %, et d’une hausse de son chiffre d’affaires de 3,4 % à 1,033 milliard d’euros. Même satisfaction chez son grand concurrent Kronenbourg (Kronenbourg, 1664, Carlsberg, Skoll, Grimbergen, Tourtel), qui revendique une croissance de ses volumes de 3,8 %, identique à celle de son chiffre d’affaires qui atteint 972 millions d’euros.

Face à la déferlante des microbrasseries et à leur succès auprès des clients désireux de goûter des breuvages plus locaux et artisanaux, les géants adaptent leur offre. Heineken France complète son assortiment avec des bières dites artisanales achetées par le groupe dans de nombreux pays. Pour sa part, Kronenbourg a ouvert fin 2018 une petite brasserie à Strasbourg à l’enseigne Le Tigre et propose à Paris pendant le mois de mai un brassin spécifique de sa 1664.

Tous deux continuent aussi à renforcer leur outil industriel. Kronenbourg se dit prêt à ajouter une ligne de production supplémentaire sur son site d’Obernai. Les travaux débuteront mi-2019 pour un investissement de 45 millions d’euros. Heineken a annoncé un plan similaire pour sa brasserie La Valentine à Marseille moyennant 30 millions d’euros. Et ajoute 6 millions d’euros pour brasser sa bière sans alcool Heineken 0.0 à Schiltigheim (Bas-Rhin). Les méga-brasseries ont encore de l’avenir…