La première ministre britannique, Theresa May, à son arrivée à Bruxelles, le 21 mars. / TOBY MELVILLE / REUTERS

Un peu, mais pas trop. Les dirigeants européens s’apprêtent à rejeter le report de trois mois du Brexit que vient leur présenter, jeudi 21 mars, lors d’un sommet à Bruxelles, la première ministre britannique, Theresa May. Ils jugent en effet que la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne peut être retardée, mais pas au-delà des élections européennes de mai.

Theresa May est attendue en début d’après-midi par les chefs d’Etat et de gouvernement des 27 autres pays de l’Union européenne, lassés des atermoiements britanniques et décidés à poser leurs conditions à un court décalage du divorce.

  • Une prolongation jusqu’au 22 mai en vue

Mme May exposera en personne aux Européens ce qu’elle leur a écrit la veille : la demande d’un décalage du Brexit – initialement prévu le 29 mars – jusqu’au 30 juin, pour avoir le temps de convaincre les parlementaires britanniques d’accepter, puis de ratifier, le traité de divorce conclu avec l’UE… traité qu’ils ont déjà rejeté par deux fois.

Mais, lors d’une réunion informelle mercredi soir, les ambassadeurs des 27 ont déjà donné leur position. « La question de la date sera une décision des chefs d’Etat », à prendre à l’unanimité, a insisté une source européenne, selon qui l’idée est, pour l’heure, de refuser la date du 30 juin et de se diriger vers une prolongation plus courte.

A priori, la date du 22 mai a rassemblé « une large majorité », car elle intervient juste avant les élections européennes, qui se tiennent du 23 au 26 mai, a précisé une source diplomatique, tout en ajoutant que plusieurs représentants n’avaient pas encore reçu les instructions de leurs capitales.

De son côté, la Commission européenne souhaite, elle aussi, éviter à tout prix un report jusqu’au 30 juin. Elle estime en effet qu’un tel délai « entraînerait de graves risques juridiques et politiques pour l’UE », car le Royaume-Uni serait tenu d’organiser le scrutin européen, et ce, même s’il se retire ensuite avant la session inaugurale du Parlement, début juillet. S’il ne le faisait pas, il mettrait en péril la légalité du nouveau Parlement avec le risque d’une paralysie durable du fonctionnement de l’UE, a mis en garde l’exécutif européen.

  • Les 27 font monter la pression sur Londres

Emmanuel Macron à son arrivée à Bruxelles, le 21 mars. / TOBY MELVILLE / REUTERS

Jeudi, lors de son arrivée au sommet, Emmanuel Macron a averti qu’en cas de nouveau rejet de l’accord sur le Brexit par les députés britanniques « nous irions vers un “no deal” ». « S’il n’y a pas de vote positif [à la Chambre des communes], alors nous irons dans la direction d’un “no deal” », a également prévenu le premier ministre luxembourgeois, Xavier Betel.

« Je crois qu’une courte extension sera possible », avait déjà avancé mercredi le président du Conseil européen, Donald Tusk, maître de cérémonie du sommet à Bruxelles. Mais « elle sera conditionnée à un vote positif sur le traité de retrait à la Chambre des communes », a-t-il prévenu, alors que Mme May cherche à soumettre une nouvelle fois au vote l’accord de divorce qu’elle a conclu en novembre avec Bruxelles.

  • Theresa May charge les députés britanniques

Malgré un rejet massif par deux fois, la dirigeante conservatrice n’a pas perdu l’espoir de voir changer d’avis les députés britanniques à propos de l’accord de retrait, et veut organiser un nouveau vote « aussi vite que possible ». Lors d’une courte allocution à Downing Street mercredi soir, à neuf jours de la date prévue du Brexit, Theresa May s’est placée du côté du peuple contre le Parlement, s’attirant les foudres des parlementaires.

« Vous en avez marre des disputes, des jeux politiques et des querelles procédurales obscures », a lancé Theresa May aux Britanniques. « Il est maintenant temps pour les députés de se décider », a-t-elle ajouté, espérant convaincre ses concitoyens de faire pression sur leurs élus pour qu’ils soutiennent cet accord de retrait.

Le temps presse avant le 29 mars, avec le risque plus que jamais redouté d’un départ britannique brutal, sans l’accord et la période de transition que les deux parties ont âprement négociés pendant un an et demi, et que l’UE refuse de modifier.

  • Une nouvelle rencontre avant le 29 mars ?

Lors du sommet, « on aura une indication de ce que les 27 sont prêts à accorder en cas de vote positif » au Royaume-Uni, a indiqué un diplomate, tandis qu’une « décision formelle » sera prise plus tard par les 27 en fonction des événements au Royaume-Uni.

Si le Parlement britannique rejetait à nouveau ce texte, l’UE serait-elle toujours prête à accorder un report du Brexit, forcément plus long ? « Seulement s’il y a un changement politique majeur » au Royaume-Uni, comme de nouvelles élections ou un nouveau référendum, a prévenu un diplomate.

« Si, la semaine prochaine, il n’y a pas de vote ou pas de vote positif au Parlement britannique, dans ce cas, il faudra voir s’il faut une nouvelle rencontre du Conseil européen » avant le 29 mars, a prévenu la chancelière allemande, Angela Merkel, jeudi matin, devant le Bundestag.

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