Quelques clics sur un ordinateur, le numéro d’identification personnel des deux conjoints et 420 couronnes danoises, soit 55 euros environ. C’est tout ce qu’il fallait, depuis 2013, pour obtenir un divorce expéditif au Danemark, pays de 5,3 millions d’habitants, où 46,57 % des mariages se terminent par une séparation. Une réglementation qui va changer à partir du 1er avril, pour les parents d’enfants mineurs. Peu importe leur empressement, ils devront désormais patienter trois mois et subir un test obligatoire sur Internet avant d’obtenir la dissolution de leur union.

Au programme du quiz d’environ une demi-heure : des questions sur les sentiments des parents et des enfants, les conséquences du divorce pour la famille, l’état des relations entre les conjoints… Et six dilemmes auxquels les futurs divorcés seront inévitablement confrontés.

« Collaborer » après le divorce

Un exemple : votre compagnon a promis de venir chercher les enfants à 16 heures pétantes. Il est 16 h 20. Comment formulez-vous le SMS que vous lui envoyez ? Première alternative : « Salut. Nous t’attendons. Pourrais-tu être gentil et nous dire quand tu comptes arriver ? Bien cordialement. » La seconde : « Qu’est-ce que tu fous ?! » La troisième : « Salut. J’espère que tu vas bien et qu’il ne t’est pas arrivé quelque chose, comme tu es en retard. A très vite. Bisous. »

Aucune réponse n’est mauvaise, car en fait de test, il s’agit plutôt d’un questionnaire pour faire réfléchir, proposer des pistes et des solutions, afin d’assurer le bien-être des enfants et de ménager les relations entre futurs ex-partenaires. Une sorte de session de thérapie en solo, devant son ordinateur.

Et ça marche, à en croire les deux chercheurs de l’université de Copenhague – un professeur de santé publique et un doctorant en psychologie – qui ont développé le programme, composé de dix-sept modules (dont un seul sera obligatoire) et intitulé « La collaboration après le divorce ». Pour preuve : ils l’ont testé sur 2 600 parents, entre 2015 et 2018. La moitié a eu accès au site. L’autre constituait le groupe de contrôle. Résultat : au bout d’un an, les parents « entraînés » montraient moins de signes d’angoisse et de symptômes de dépression et affichaient deux fois moins d’arrêts maladie que les autres.

Consensus au Parlement

A Christiansborg, au Parlement danois, le programme est rapidement devenu un sujet de consensus entre les partis politiques. Opposés aux divorces expéditifs dans le cas de familles avec de jeunes enfants, tous voulaient une réforme, soutenue également par les organisations non gouvernementales (ONG). Mais peu s’accordaient sur la méthode.

Ainsi, les sociaux-démocrates, soutenus par les députés populistes du Parti du peuple danois, plaidaient par exemple pour une session d’une heure obligatoire chez le psychologue ou l’assistante sociale, dans les trois mois après le divorce, pour les parents de mineurs. Proposition immédiatement rejetée par les libéraux, y voyant une intrusion excessive de l’Etat dans les affaires privées des Danois.

Finalement, le texte de loi, proposé par la ministre conservatrice aux affaires sociales et à l’enfance, Mai Mercado, a été adopté le 20 décembre par l’ensemble des formations politiques représentées au Parlement, même si le parti de l’Alliance libérale n’a pas caché qu’il aurait préféré que le test sur Internet reste optionnel. Vendredi 29 mars, la députée sociale-démocrate Pernille Rosenkrantz-Theil, chargée de la politique sociale du parti, applaudissait « une conquête pour la société de bien-être », affirmant qu’elle avait divorcé « depuis plusieurs années », mais qu’elle était prête « à passer le test ».