Yacine vient de récupérer grâce à une application dédiée deux trotinnettes à recharger. / CYRIL ABAD POUR "LE MONDE"

Emmanuel Grégoire, le premier adjoint d’Anne Hidalgo, est le premier à le reconnaître : à Paris, l’arrivée des trottinettes électriques, « c’est le Far West ! ». En quelques mois, une petite dizaine de sociétés se sont lancées à l’assaut du marché, en déposant ici ou là dans les rues des milliers de trottinettes accessibles en libre-service. Le résultat ? Des trottinettes en stationnement qui gênent les piétons, des utilisateurs qui n’hésitent pas à rouler sur les trottoirs, des accidents, et de plus en plus d’exaspération…

La mairie de Paris a décidé de mettre un peu d’ordre dans ce grand bazar. Prochaine étape, annoncée lundi 1er avril par Emmanuel Grégoire : la création de zones de stationnement spécifiques, comme il en existe déjà pour les vélos et les scooters. Il devrait s’agir d’emplacements bien délimités sur la chaussée ou sur certains trottoirs assez larges, par exemple entre deux arbres, à un endroit où les piétons ne passent pas.

Christophe Najdovski, l’adjoint (EELV) chargé notamment des transports, précise :

« Nous avons commencé à travailler pour choisir les futures zones avec l’agence de design Vraiment Vraiment, le Pavillon de l’Arsenal et les opérateurs de trottinettes. »

Mécontentement croissant des Parisiens

La création de ces stationnements devrait être intégrée dans la charte que prépare la municipalité avec Lime et les autres exploitants de trottinettes. Cette charte est en négociation depuis des mois déjà, mais ne prévoyait pas jusqu’à présent la mise en place de ces zones de stationnement. Face au mécontentement croissant des Parisiens, « nous avons ajouté ce point dans la nouvelle version du texte transmise aux opérateurs il y a quinze jours », indique Christophe Najdovski. Il espère que la charte pourra être bouclée d’ici à six semaines.

La mairie a par ailleurs annoncé une autre mesure destinée à limiter l’invasion des trottinettes : l’instauration d’une redevance proportionnelle à la flotte, imposée aux opérateurs. L’exploitant d’un parc de moins de 500 trottinettes devra ainsi s’acquitter de 50 euros par an et par appareil ; 65 euros au-delà de 3 000 trottinettes. Le projet doit être validé cette semaine par le conseil de Paris. Objectif : éviter que les plus grosses sociétés n’inondent Paris avec des dizaines de milliers de véhicules, histoire d’empêcher leurs concurrents de trouver leur place.

Au passage, cette taxe fera rentrer un peu d’argent dans les caisses municipales. Au-delà de ces deux mesures, Anne Hidalgo et son équipe attendent avec impatience la future loi sur les mobilités, prévue pour les mois à venir. Seule une loi permettra selon la mairie d’organiser de façon juridiquement solide l’essor des trottinettes électriques en ville.

Le marché des trottinettes électriques en forte hausse

Le marché des engins de déplacement personnel – trottinettes, gyropodes et hoverboards – a progressé de 32 % en valeur en 2018, poussé par une croissance de 76 % de la trottinette électrique, selon une étude publiée lundi 1er avril.

Ce marché a atteint 278 millions d’euros l’an dernier, accessoires compris. Il a plus que doublé en deux ans, puisqu’il était de 134 millions d’euros en 2016 et de 210 millions en 2017, selon le baromètre de la Fédération des professionnels de la micromobilité et de l’agence de prospective Smart Mobility Lab.

Il s’est écoulé l’an dernier 232 749 trottinettes électriques, pour une valeur de 111 millions d’euros. Suivaient les hoverboards (301 500 unités, pour 45,8 millions d’euros), les skate-boards électriques (26 200, 3,3 millions d’euros), les gyroroues (4 200 unités, 2,8 millions d’euros) et les gyropodes (2 200 unités, 1,9 million d’euros).