Le « Grande-America » a coulé le 12 mars dans le golfe de Gascogne. / LOÏC BERNARDIN / MARINE NATIONALE / AP

Depuis trois semaines, le navire Grande-America repose par 4 600 m de fond, au milieu du golfe de Gascogne, à 300 km des côtes bretonnes. Immobilisé par un violent incendie le 10 mars, le navire italien avait sombré, deux jours plus tard, avec à son bord 365 conteneurs, 1 050 tonnes de matières dangereuses et 2 200 tonnes de fioul lourd. Un registre de bord qui faisait craindre de lourdes conséquences pour l’environnement et le déclenchement, dès le 14 mars, d’une pré-alerte à la pollution pour débloquer des moyens d’intervention.

Trois semaines après le déclenchement du Biscaye Plan, dispositif de lutte contre les pollutions maritimes majeures, le préfet maritime de l’Atlantique, Jean-Louis Lozier, a fait un état des lieux des opérations, mardi 2 avril.

  • Plusieurs dizaines de tonnes de fioul lourd solide récupérées en mer

Au total, « une dizaine de navires de lutte antipollution », affrétés par la marine nationale, la marine espagnole et l’Agence européenne pour la sécurité maritime, ont été mobilisés depuis le 12 mars. Ils ont permis de récupérer, à ce jour, plusieurs dizaines de tonnes de fioul lourd sous forme solide, et plusieurs centaines de tonnes d’eau polluée par des hydrocarbures. Par ailleurs, « six conteneurs à la dérive ont été récupérés, ainsi que les embarcations de sauvetage du Grande-America, grâce à des navires affrétés par l’armateur », selon le préfet maritime de l’Atlantique.

Ces opérations de secours opérées en mer sont importantes, car une tonne de polluants récupérés en mer constitue « une dizaine de tonnes de déchets en moins à récupérer sur les côtes », selon la préfecture. Dans l’eau, le pétrole gonfle, se disloque, se mélange avec du sable ou de la roche, ce qui « multiplie par dix » la quantité de déchets polluants à traiter une fois sur les côtes.

  • La nappe qui dérivait n’est plus visible du ciel

Après le naufrage, deux nappes de fioul avaient été repérées autour de la zone du drame. La première, située à la verticale de l’épave, était constituée de « fuites résiduelles », selon le préfet maritime. Celle-ci est toujours observable et forme une « irisation de faible intensité ». Elle continue « pour le moment d’être traitée par un navire antipollution ».

En revanche, la seconde, dont l’extension maximale a été nommée « front de l’avant » par les secours, n’est plus détectable par observations spatiales et aériennes, malgré des conditions météorologiques particulièrement bonnes en termes de visibilité ces derniers jours. Celle-ci avait dérivé lentement vers le sud dans un premier temps, « puis sa trajectoire s’est infléchie progressivement vers l’ouest, l’éloignant encore plus de nos côtes pour la grande majorité », selon le préfet maritime de l’Atlantique.

En se dispersant ainsi, la nature de la nappe « a évolué vers de petits amas de fioul morcelés », a détaillé Jean-Louis Lozier. Si la zone « continuera d’être particulièrement surveillée », a annoncé le préfet maritime de l’Atlantique, « nous n’y affecterons plus de navire de lutte antipollution ».

Photographie réalisée la 13 mars par la marine nationale française montrant l’une des deux nappes de fuel échappées du « Grande-America ». / AP

  • Un risque de pollution « dispersée et limitée »

Si le risque d’une marée noire d’ampleur semble écarté par l’éclatement de la nappe de fioul perpendiculaire à l’épave, le préfet maritime de l’Atlantique a insisté sur le fait que la totalité du polluant émis par le Grande-America n’a pu être récupérée. « Un jour ou l’autre, des boulettes de fuel résiduelles issues du Grande-America sont susceptibles d’arriver sur nos côtes », a-t-il prévenu, avant de préciser que « cette pollution devrait être très dispersée et limitée ».

  • L’épave « localisée avec précision » par un robot sous-marin

A la demande de la préfecture, l’armateur, la société italienne Grimaldi Lines, a affrété le navire Island-Pride, spécialisé en travaux sous-marins et doté d’un robot sous-marin téléguidé (ROV), afin d’inspecter la zone de naufrage. Arrivé samedi sur les lieux du naufrage, l’engin « a débuté son travail de repérage et d’évaluation », a annoncé le préfet, qui a précisé que « l’épave a été localisée avec précision ».

Les travaux du navire Island-Pride vont se poursuive pour « définir la nature des dommages subis, l’état précis de l’épave mais aussi les risques liés pour l’environnement marin ». Sur ce dernier point, l’armateur devra, en outre, fournir un plan d’action pour traiter sur le long terme l’impact environnemental de ce naufrage.

Une enquête préliminaire a été ouverte par le procureur de la République de Brest et, en parallèle, une enquête technique est actuellement menée par le Bureau enquête accident (BEA) mer italien en lien avec le BEA mer français.