Canal+, jeudi 4 avril à 21 heures, série

« Sonnez tambours, résonnez trompettes ! » : il se pourrait que la saison 2 de False Flag soit encore plus réussie que la première. False Flag (« fausse bannière » en VF, expression qui désigne des opérations secrètes visant à tromper l’ennemi par des signes de reconnaissance) ou en hébreu Kfulim (« doubles », pour agents doubles) a été imaginée par Amit Cohen et Maria Feldman – laquelle a également travaillé sur la très remarquée Hatufim. Dans False Flag saison 1 donc, cinq citoyens israéliens lambda découvraient, ébahis, qu’ils étaient suspectés de l’enlèvement du ministre de la défense iranien, le tout sur fond d’intrigue moscovite. Mossad et Shin Bet se tiraient dans les pattes, et les grandes trahisons se mêlaient à tout un tas de petits mensonges – la série combinant habilement les codes classiques du thriller et des enjeux plus personnels.

Lire la critique de la saison 1 de « False Flag » : Dans les coulisses des services secrets

Pour Oded Ruskin, son réalisateur, un thriller ne peut d’ailleurs exister sans drame intimiste : « On ne peut pas être emporté par le suspense si on ne creuse pas les tensions personnelles qui le nourrissent », déclarait-il à Télérama en novembre 2017. Mais en Israël, il est rare que la politique ne s’invite pas à table ou, comme le dit si bien l’un des romanciers les plus populaires du pays, Etgar Keret : « Ici, avant même de te dire bonjour, de savoir si tu vas bien ou comment s’appelle ta petite amie, on te demande où tu as fait l’armée et pour qui tu votes. »

Dimension politique

Ainsi la saison 1 s’inspirait-elle librement d’un fait réel : l’assassinat, probablement par les services secrets israéliens, de Mahmoud al-Mabhouh, un haut responsable du Hamas, dans un hôtel de Dubaï en 2010. Il était donc prévisible que la saison 2 soit aussi politique. Aussi et d’abord, devrait-on préciser, puisqu’elle s’ouvre sur un attentat le jour de l’inauguration d’un pipeline entre la Turquie et Israël, qui aurait dû assurer, du moins à en croire le discours de la ministre israélienne de l’énergie, une paix durable dans la région. Tout de suite, l’ennemi est désigné : il s’agirait du Hezbollah. Trois Israéliens sont suspectés, et, comme dans la première saison, c’est à leur vie, qui soudain bascule, que s’intéresse très vite la série. Sont-ils ou non coupables, et de quoi ? Quels cadavres, plus ou moins encombrants, cachent-ils dans leurs placards ?

Difficile dès lors de ne pas penser à la phrase de Malraux : « Pour l’essentiel, l’homme est ce qu’il cache : un misérable petit tas de secrets. » Cela donne des scènes terribles et émouvantes : « J’ai partagé le lit d’un membre du Hamas ou du Hezbollah », s’effondre Mika, ce qui lui vaut, en sus, d’être lynchée par ses voisins, qui la traitent de sale pute couchant avec les Arabes. Ou encore celle où Miriam découvre que sa fille est… Evitons de « spoiler », disons simplement que l’actrice qui joue Miriam est une immense comédienne de théâtre et de cinéma : inconnue ou presque encore en France, Hanna Azoulay Hasfari a par deux fois été récompensée par le prix Ophir, l’équivalent de nos Césars. D’ailleurs, toute la distribution de cette saison est remarquable : Mickey Leon (vu notamment dans Hatufim et Hostages) qui joue le rôle d’Eytan Koppel (ou Eitan Kopel), l’inspecteur en chef du Shin Bet, est excellent. Il ne reste qu’à espérer que False Flag soit renouvelé pour une troisième saison.

False Flag saison 2 - Bande Annonce - CANAL+
Durée : 00:47

False Flag, saison 2, réalisée par Oded Ruskin (Israël, 2018, 10 x 42 min). Deux épisodes chaque semaine ; et en intégralité sur Mycanal.