Le président russe, Vladimir Poutine, et le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, à Moscou, Russie, le 4 avril 2019. / POOL / REUTERS

L’opération avait été baptisée « Chanson douce-amère ». Jeudi 4 avril à Moscou, le président russe, Vladimir Poutine, a révélé que son armée déployée en Syrie avait réussi à retrouver la dépouille d’un soldat israélien disparu en 1982 lors d’affrontements contre l’armée de Damas. L’annonce a été faite lors d’une visite en Russie du premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou.

Le commandant de char Zachary Baumel s’était volatilisé une nuit de juin, en pleine invasion israélienne au Liban, il y a près de trente-sept ans. Né aux Etats-Unis en novembre 1960, le jeune homme de 22 ans avait immigré en Israël en 1970, et était entré dans l’armée. Commandant de char du 362e bataillon blindé, il a manqué à l’appel après la bataille de Sultan Yacoub, qui avait opposé les forces israéliennes à l’armée syrienne en territoire libanais, dans la plaine de la Bekaa à proximité de la frontière avec la Syrie.

Impératif moral

« Nos militaires, avec nos partenaires syriens, ont déterminé le lieu de l’inhumation » du soldat israélien, a expliqué Vladimir Poutine. « Toutes les expertises ont été menées, les restes sont chez nous, et en vertu des traditions militaires (…) nous [les] enverrons en Israël. »

Lors de la cérémonie qui s’est tenue jeudi au ministère de la défense russe en présence de M. Nétanyahou et du chef d’état-major russe, Valéri Guérassimov, ce sont des effets personnels du soldat, placés dans un cercueil couvert du drapeau israélien, qui ont été remis aux autorités israéliennes. En Israël, les soldats disparus font partie de la mémoire collective et le retour de leurs dépouilles est considéré comme un impératif moral.

M. Nétanyahou a expliqué avoir demandé à la Russie son aide il y a deux ans pour retrouver en Syrie les restes de soldats israéliens disparus. Il a précisé que les funérailles de Zachary Baumel auraient lieu dès jeudi soir en Israël : « Il y aura une cérémonie très émouvante. Les amis et la famille de Zachary y prendront part. » Le premier ministre israélien a remercié le ministère de la défense et l’armée russes : « Nous n’oublierons pas cet acte. Il entrera dans l’histoire. »

Une part de mystère demeure toutefois sur la manière dont les Russes ont recueilli la dépouille du soldat perdu. Le premier ministre israélien a simplement déclaré que « les soldats russes, au péril de leur vie, ont ramené les restes de Zachary sur le territoire israélien ». Vladimir Poutine a de son côté déclaré qu’il n’avait « pas été facile » de retrouver le corps.

Rôle pivot de la Russie

Au-delà des traditions militaires, des honneurs et des symboles, l’opération « Chanson douce-amère » a une portée politique majeure pour Moscou. A quelques jours d’élections législatives en Israël qui s’annoncent difficiles pour Benyamin Nétanyahou, cerné par les affaires de corruption, elle permet à Vladimir Poutine d’offrir à un succès emblématique à peu de frais qu’il pourra faire valoir auprès de son électorat.

Pour le Kremlin, la dépouille du commandant Baumel offre aussi l’occasion de mettre en avant le nouveau rôle de pivot que joue la Russie dans la région. Alliée du régime de Damas, elle entretient de bonnes relations avec Israël, techniquement en état de guerre avec la Syrie, ainsi qu’avec la Turquie, parrain des forces irrégulières issues de la rébellion syrienne.