Ne pas « sacrifier sur l’autel » de l’« ultralibéralisme » le modèle français, telle est la requête exprimée par une vingtaine de cinéastes, qui interpellent le président Macron sur la future loi audiovisuelle dans une tribune publiée par le Journal du dimanche.

Ce texte, intitulé 60e anniversaire du ministère de la culture : le combat continue ?, est notamment signé par Claude Lelouch et Radu Mihaileanu, les présidents de l’ARP (Société civile des auteurs, réalisateurs et producteurs). Ils déplorent que les géants américains (Disney-Fox, Netflix, Amazon, Apple, Facebook) « accentuent une hégémonie que nous étions parvenus jusqu’ici à limiter grâce à l’exception culturelle » et « déploient de véritables stratégies de prédation économique pour inonder les territoires européens de contenus américains ».

« Ils ébranlent les écosystèmes vertueux que nous avons mis tant d’années à construire », regrettent-ils, estimant que « si ce modèle vertueux doit être modernisé à l’ère numérique, il ne peut en aucun cas être sacrifié sur l’autel d’un ultralibéralisme déjà en partie responsable de la dégradation de nos sociétés et de la poussée des extrémismes ».

Le risque que ce mandat soit « le fossoyeur du cinéma français »

Pour les cinéastes, « c’est malheureusement cette voie qu’a privilégiée l’Autorité de la concurrence dans son récent rapport relatif à la prochaine loi audiovisuelle » qui doit être présentée cet été en conseil des ministres par le ministre de la culture. Ils déplorent également les récentes déclarations du ministre de l’action et des comptes publics, Gérald Darmanin, « qui souhaite la fin du service public audiovisuel en supprimant la redevance ».

« Avant nous, l’Espagne et l’Italie ont connu cette vague de dérégulation, qui a tout emporté sur son passage, détruisant des cinématographies autrefois brillantes au niveau international, ainsi que des milliers d’emplois. »

« Monsieur le président, votre action politique doit porter les valeurs culturelles pour lesquelles l’Etat français s’est toujours battu, au risque sinon que ce quinquennat, avec cette loi, ne soit le fossoyeur du cinéma et de l’audiovisuel français », préviennent les signataires.

Ils précisent que l’ARP organisera plusieurs débats publics sur le thème, dont le premier aura lieu le 6 mai au Cinéma des cinéastes à Paris, et lance un cercle de réflexion « associant une trentaine de personnalités de notre secteur, réunies pour dessiner les contours du cinéma et de l’audiovisuel de demain, au-delà des intérêts particuliers ».