France 5, dimanche 7 avril à 22 h 40, documentaire

La désinformation n’a pas attendu l’ère numérique pour tromper le public. Passés maîtres en la matière, les responsables chargés de la propagande nazie ont réussi, dans la ville forteresse tchèque de Terezin transformée en camp d’internement (et dernière étape avant le voyage final vers Auschwitz), à faire croire que les hommes, femmes et enfants juifs rassemblés derrière les remparts y étaient bien traités.

Ce documentaire revient notamment, avec des archives filmées d’époque, sur le tournage d’un film de propagande destiné à rassurer l’opinion internationale. Grâce au témoignage d’Ela Stein-Weissberger, disparue le 30 mars 2018, ce film rend hommage aux quinze mille enfants juifs qui, comme Ela, connurent Terezin et dont seuls une centaine survivront aux camps de la mort. Le quotidien des enfants du camp, raconté par Ela mais aussi par Hanna, 16 ans à l’époque et survivante d’Auschwitz, fait la force de ce documentaire poignant.

Manipulation réussie

Dès novembre 1941, de nombreux artistes juifs avaient été regroupés à Terezin. Flairant le bon coup, les nazis décident, en 1943, de tourner un film baptisé Le Führer donne une ville aux juifs. La réalisation est confiée à Kurt Gerron, chansonnier juif berlinois très connu avant-guerre, et qui sera gazé à Auschwitz en 1944. Avant le tournage, les nazis font disparaître 7 500 détenus trop maigres et malades, afin de masquer les conditions effroyables du ghetto. Ela, âgée d’une quinzaine d’années, se retrouve sur scène et face caméra, en compagnie d’autres enfants, pour jouer Brundibar, un opéra dans lequel elle tient l’un des rôles principaux, celui du chat. Près d’elle, un vilain moustachu dont les enfants se moquent. Preuve, selon les nazis, que ces enfants chanteurs vivent normalement…

Lire le récit : Terezin chantait

Autre manipulation réussie : celle de la visite rapide de Terezin, le 23 juin 1944, par une délégation composée de deux représentants danois de la Croix-Rouge et du jeune docteur suisse Maurice Rossel. En balisant la visite, en donnant généreusement à manger aux détenus pour l’occasion et en empêchant tout contact direct entre représentants de la Croix-Rouge et population du ghetto, les nazis obtiennent ce qu’ils veulent : faire croire au monde que les juifs ne sont pas maltraités. Dans son rapport, Rossel note : « La population est bien nourrie. Les enfants s’amusent et vont à l’école… » Ces mêmes enfants qui, dans les semaines suivantes, seront envoyés à Auschwitz.

[EXTRAIT] Les enfants de Terezin et le monstre à moustache - 7/04/2019
Durée : 00:58

Les Enfants de Terezin et le Monstre à moustache, d’Henriette Chardak (Fr., 2018, 55 min). www.francetvpro.fr