Un usine du constructeur de moteurs automobiles Xinchen China Power, à Mianyang dans la province du Sichuan, en Chine, le 28 mars 2019. / China Stringer Network / REUTERS

D’abord, un constat : l’économie mondiale va moins bien. Il y a un an, l’activité accélérait dans presque toutes les régions du globe. En 2019, 70 % de l’économie planétaire devraient connaître un ralentissement, selon les dernières prévisions du Fonds monétaire international (FMI) dévoilées mardi 9 avril.

Ensuite, une tentative de projection : la situation pourrait s’améliorer… ou se dégrader fortement. « C’est un moment délicat », a résumé la nouvelle économiste en chef de l’institution, l’américano-indienne Gita Gopinath, alors que débutent, à Washington, les traditionnelles réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale.

  • Un coup de frein global

Tout en insistant sur les « incertitudes considérables » susceptibles de modifier le cours des événements, le Fonds livre son scénario de croissance. Et il n’est guère réjouissant. Après avoir atteint un pic de près de 4 % en 2017, la progression du produit intérieur brut (PIB) mondial a ralenti à 3,6 % l’an dernier et devrait encore décélérer à 3,3 % cette année – très loin des 3,9 % que le FMI projetait lors de ses réunions de printemps de 2018.

Depuis, les perturbations se sont multipliées : escalade des tensions commerciales entre Washington et Pékin, essoufflement de la croissance en Chine, stress financier au sein de grandes économies émergentes telles que l’Argentine et la Turquie, trou d’air en Allemagne où la production automobile a souffert de l’introduction de nouvelles normes antipollution…

Ce contexte a pesé sur la confiance des entreprises et la demande globale. Avec une production manufacturière en berne et un commerce mondial fonctionnant au ralenti, l’année 2019 a démarré sur de mauvaises bases. Le coup de frein concerne toutes les grandes économies. Même les Etats-Unis où la croissance, jusqu’ici dopée par le stimulus fiscal de Donald Trump, devrait passer à 1,8 % cette année après 2,2 % en 2018. En Allemagne, le PIB progressera de 0,8 % seulement. La France fera mieux mais ne dépassera pas 1,3 %. Quant à la croissance chinoise, elle s’établira à 6,3 % après 6,6 % l’an dernier.

  • Une reprise précaire

Le FMI prévoit un rebond à partir du second semestre et un retour de la croissance mondiale à un rythme de 3,6 % en 2020. D’abord parce que la Chine, qui contribue à elle seule à un tiers de la croissance planétaire, met désormais les bouchées doubles pour soutenir son économie. Ensuite, les grandes banques centrales, du Japon aux Etats-Unis en passant par la zone euro, ont suspendu le retour à la normale de leur politique monétaire. Si elles ne volent pas au secours de la conjoncture, au moins veillent-elles à ne pas la pénaliser. Enfin, sur le front commercial, Washington et Pékin multiplient les signaux d’apaisement.

Pour autant, les aléas restent nombreux. La trève sino-américaine est fragile et les menaces protectionnistes de Donald Trump pourraient finir par viser des pans importants de l’économie mondiale, comme l’automobile européenne. Le risque d’un Brexit sans accord inquiète aussi alors que le Royaume-Uni peine à boucler son divorce avec l’Union européenne. Un tel accident pourrait ébranler les investisseurs. D’autres scénarios noirs sont susceptibles de déclencher une forte aversion au risque sur les marchés. Parmi ceux-là, le FMI cite une hausse des taux italiens couplée à une récession de la Péninsule, qui pourrait fragiliser les banques du pays et entraîner de possibles effets de contagion pour d’autres économies de la zone euro.

  • Une marge de manœuvre étroite

Si ces risques se réalisaient, les perspectives économiques pourraient « se détériorer de façon spectaculaire », met en garde Mme Gopinath. Or pour conjurer ces menaces, la marge est étroite. Les gouvernements ne peuvent se reposer sur les banques centrales qui ont largement épuisé leurs possibilités. Mais l’arme budgétaire est aussi limitée alors que l’endettement atteint des niveaux préoccupants partout dans le monde. Le FMI appelle les pays à agir de façon coordonnée pour soutenir l’activité, chacun en fonction de sa situation.

La priorité est de renforcer la résilience des économies, en œuvrant en faveur de l’innovation, de la productivité et de l’amélioration des conditions de vie. Au niveau international, après des mois de tensions politiques qui ont entamé l’optimisme des ménages et des entreprises et affaibli l’investissement, le Fonds appelle à raffermir le multilatéralisme et la coopération.

Ces préconisations sont dans la ligne des conseils égrenés par le FMI de rapports en réunions. Mais comme le rappelle l’institution, dans un environnement de profonde incertitude, « il est impératif d’éviter de coûteuses erreurs politiques ».