Le Canada veut durcir sa législation envers les demandeurs d’asile, notamment ceux qui ont été refusés dans un autre pays. Cette mesure, glissée dans un projet de loi budgétaire de 392 pages présenté lundi 8 avril, fait suite à un afflux de demandeurs d’asile, notamment en provenance des Etats-Unis depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison Blanche.

« Nous reconnaissons que le monde est dans une situation où il y a beaucoup plus de demandeurs d’asile, beaucoup plus de migrations à travers la planète », a justifié le premier ministre canadien, Justin Trudeau, interrogé mercredi sur ce tour de vis migratoire. « Ma promesse aux Canadiens a toujours été de faire en sorte que notre système d’immigration fonctionne, qu’il soit appliqué de façon rigoureuse et qu’il continue de l’être », a ajouté M. Trudeau.

Selon le ministre de l’immigration, Ahmed Hussein, cette nouvelle mesure devrait entraîner le rejet d’un millier de demandes d’asile supplémentaires chaque année. « Si vous pouvez demander l’asile dans un pays comme l’Australie, où la politique en la matière est solide, pourquoi pourriez-vous ensuite demander l’asile au Canada ? Ça s’appelle faire son marché et nous sommes contre. Et l’ONU est également contre », a plaidé le responsable politique.

Enjeu électoral

Depuis l’arrivée de Donald Trump au pouvoir début 2017, près de 40 000 demandeurs d’asile sont entrés illégalement au Canada en franchissant la frontière américaine, selon les statistiques officielles. Le gouvernement libéral de M. Trudeau est régulièrement accusé par l’opposition conservatrice de mal gérer cet afflux de migrants en provenance des Etats-Unis. Cette question pourrait occuper une place importante dans le débat politique, à quelques mois des élections législatives d’octobre où Justin Trudeau est en mauvaise position.

Plusieurs défenseurs des réfugiés se sont insurgés contre ce projet de durcir la législation, dans un pays pourtant réputé pour sa tradition d’accueil généreuse. Après son arrivée au pouvoir, en 2015, Justin Trudeau s’était par ailleurs engagé à accueillir quelque 25 000 réfugiés syriens fuyant la guerre dans leur pays.

Après ce revirement spectaculaire, le Conseil canadien pour les réfugiés (CCR), qui regroupe une centaine d’ONG, a exprimé sa « profonde consternation » :

« Si elles sont adoptées, ces dispositions exposeront de nombreuses personnes à un risque accru d’être refoulées vers la persécution, en violation des obligations internationales du Canada en matière de droits humains. »

Rahaf, la Saoudienne réfugiée au Canada, raconte son histoire
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