La ville de Damaturu est située dans l’Etat de Yobe, dans le nord-est du Nigeria. / Google Maps

Des combattants de Boko Haram ont attaqué mardi 9 avril une ville du nord-est du Nigeria, tandis que l’armée se préparait à une offensive contre les islamistes dans la région, évacuant des milliers de gens. Selon des habitants de la ville de Damaturu, dans l’Etat de Yobe, des membres présumés de la branche de Boko Haram affiliée au groupe Etat islamiste en Afrique de l’Ouest (Iswap) sont derrière l’attaque.

« Des djihadistes de Boko Haram ont lancé une attaque sur Damaturu vers 17 h 45 [16 h 45 GMT], tirant des coups de feu et lançant des explosifs », a déclaré à l’AFP Adamu Sani, un commerçant. Les habitants cherchent à se mettre à l’abri et des commerces ont fermé, tandis que « des camions de soldats se dirigeaient » vers la ville, a-t-il précisé. Hashimu Idris, un fonctionnaire, a ajouté que « tout le monde est à l’intérieur. Nous prions pour que les soldats les repoussent [les djihadistes], sinon ce sera une nouvelle catastrophe pour la ville », déjà attaquée par Boko Haram en 2014.

Plus de 27 000 morts depuis 2009

Des membres d’une autre faction de Boko Haram, dirigée par Abubakar Shekau, avaient lancé un raid sur Damaturu le 1er décembre 2014 où plus de 150 personnes, dont 38 policiers, avaient été tuées. En juin de la même année, un attentat à la bombe avait fait 21 morts parmi des téléspectateurs regardant un match de football en public. Cette nouvelle attaque intervient alors que l’armée nigériane se prépare à une offensive contre le groupe islamiste dans l’Etat de Borno, voisin du Yobe.

Deux mille personnes sont arrivées mardi dans la grande ville de Maiduguri, capitale du Borno, évacuées par l’armée « en raison d’une opération militaire pour détruire les insurgés dans la région », a déclaré le porte-parole de l’Agence nationale de gestion des urgences (NEMA), Abdulkadir Ibrahim. Un responsable militaire a évoqué « une grosse opération » en préparation contre l’Iswap. Les habitants de Jakana, à 40 kilomètres de Maiduguri, ont été emmenés en camion dans un camp de déplacés de la ville.

Le conflit avec Boko Haram a fait plus de 27 000 morts depuis son début en 2009 et 1,8 million de personnes sont toujours déplacées dans le nord-est du Nigeria. Mais il n’est pas le seul à déchirer le pays le plus peuplé d’Afrique, une série de violences ayant fait plus de 100 morts rien que ces quatre derniers jours à travers le pays.

Dans le Sud-Est, des « cultistes », ces petits groupes criminels ou mafieux, employés par des individus à des fins politiques ou économiques, et qui mêlent souvent croyances et rites de magie noire, ont causé la mort d’au moins huit personnes, selon des responsables locaux. Dans le Sud-Ouest, dans l’Etat d’Ondo, un braquage de banque ayant mal tourné a fait sept morts lundi.

« Tueries et enlèvements incessants »

Mais c’est dans les régions du Nord que les bilans restent les plus élevés : outre les djihadistes de Boko Haram, les groupes de voleurs de bétail sèment la terreur, tandis qu’agriculteurs et éleveurs peuls s’opposent dans la région centrale du pays. Environ 200 personnes ont d’ailleurs envahi lundi une route importante dans l’Etat de Kaduna, au niveau de Birnin Gwari, pour protester contre « les tueries et les enlèvements incessants », après la mort ce week-end de deux policiers en poste pour assurer la protection des habitants. Quelques heures auparavant, à une centaine de kilomètres de là, des violences entre agriculteurs et éleveurs peuls ont fait vingt morts, selon les chiffres officiels.

En raison du manque de personnel de sécurité, les autorités locales payent et arment des civils pour défendre les villages. Ainsi, le gouverneur de l’Etat de Zamfara, dans le nord-ouest du pays, a annoncé il y a quelques jours qu’il embaucherait 1 700 « chasseurs traditionnels » supplémentaires, s’ajoutant aux 8 500 recrutés en 2018. Les affrontements entre milices et bandits tournent souvent au bain de sang : ils ont fait 50 morts ce week-end dans l’Etat de Zamfara et 14 dans celui de Katsina, selon la police.

Le président Muhammadu Buhari, dans un communiqué publié mardi, a appelé à la paix et dénoncé « cette culture œil pour œil, dent pour dent qui a nourri nombre d’attaques ». Samedi déjà, le chef de l’Etat, réélu le 23 février pour un second mandat, avait assuré qu’il « n’y a pas d’autre problème qui occupe davantage mon esprit que la sécurité ».