Nathalie Loiseau (à droite), tête de liste LRM pour les européennes, avec d’autres membres de sa liste, le 26 mars à Paris. / GONZALO FUENTES / REUTERS

Tout avait été calé pour élire un Parlement européen post-Brexit, sans le Royaume-Uni. Le 26 mai, le nombre de sièges devait passer de 751 à 705 eurodéputés. Sur les 73 sièges britanniques, 46 sièges devaient être supprimés et bloqués pour de prochains élargissements, 27 étaient redistribués pour permettre une meilleure représentativité démographique. Dans cette redistribution, la France était particulièrement gagnante, puisqu’elle passait de 74 à 79 sièges.

Tous les états-majors politiques français se sont jusqu’ici basés sur ce chiffre pour constituer leurs listes. Mais cet édifice savamment négocié entre capitales, et adopté en juin 2018 par les chefs d’Etat et de gouvernement européens, risque de s’effondrer avec le report du Brexit au 31 octobre, acté mercredi 10 avril, si le Royaume-Uni participe au scrutin européen. La décision du Conseil européen avait certes explicitement prévu l’hypothèse que « le Royaume-Uni soit toujours un Etat membre de l’Union au début de la législature 2019-2024 ». Mais dans ce cas, le nombre de députés doit rester le même, c’est-à-dire par exemple 74 pour la délégation française, jusqu’à ce que « le retrait du Royaume-Uni de l’Union [ait] produit ses effets juridiques ». C’est-à-dire, au jour théorique du Brexit.

« Personne » ne connaît la solution

La décision n’avait cependant pas anticipé que le Brexit puisse se produire au cours de la mandature, comme cela en prend le chemin. Si le Royaume-Uni finit par divorcer de l’UE fin octobre 2019, quelques mois après que le nouvel hémicycle strasbourgeois aura siégé pour la première fois (le 2 juillet 2019), faudrait-il que la France n’élise d’emblée que 74 eurodéputés ? En prévoyant que 5 ne puissent siéger que plus tard, une fois que le Royaume-Uni aura effectivement pris le large ? Et où piocher ces noms ? En prenant les suivants dans chaque liste ? Ou en organisant des élections partielles ? Pour Nathalie Loiseau, chef de file de liste République en marche (LRM), « cela sera 79 candidats, mais 74 siégeront jusqu’à ce que les Britanniques quittent l’UE ».

Cela n’a toutefois pas été formellement acté au Conseil de mercredi soir, et cela ­nécessitera de modifier la loi électorale nationale. « Un projet de loi sera déposé fin avril pour prévoir deux phases : l’une où siègent 74 députés, puis 79 », confirme l’Elysée. Le dépôt des listes, initialement prévu entre le 23 avril et le 3 mai, devra-t-il être repoussé ? Cela n’est pas encore très clair. Rien non plus n’a été visiblement anticipé au ­Parlement européen, où la porte-parole, ­Marjory van den Broeke, ­affirme que le problème a été brièvement évoqué en conférence des présidents ­mercredi matin, mais que « personne ne sait » pour l’instant quelle sera la solution. Selon elle, « c’est à chaque Etat membre de régler cela ». En plus de la France, treize autres pays ­doivent désormais se saisir du problème.