Aziz Chouaki en 2010. / CHOUAKIFAM / CC 4.0

L’un des plus grands écrivains algériens contemporains s’est éteint. Aziz Chouaki est mort d’une crise cardiaque, mardi 16 avril, à l’âge de 67 ans. L’artiste puisait l’inspiration dans son pays d’origine avec, en toile de fond, le fondamentalisme islamiste et la migration clandestine. Il était d’ailleurs exilé en France depuis 1991, à la suite de menaces islamistes. Dans les années 1980, « il signait chaque semaine dans le Nouvel Hebdo une nouvelle inspirée de la montée de l’islamisme. Il a été menacé de mort et on a dû quitter alors le pays », rappelle son épouse à l’Agence France-Presse (AFP).

Ce fils d’instituteurs né à Tizi Rached, à l’Est d’Alger, a fait des études de lettres anglaises. Mais c’est en France que sa carrière décolle, avec Baya, le monologue d’une femme dans l’Algérie postcoloniale, en 1991. Auteur d’une quarantaine d’ouvrages, il est plus connu en France que dans son pays d’origine, dont il est resté profondément épris. Il a suivi avec enthousiasme la contestation algérienne et la démission le 2 avril d’Abdelaziz Bouteflika après vingt ans de pouvoir, et ses œuvres le ramenaient souvent vers le pays de son enfance.

Ecrire sur l’exil et son pays d’origine

En arrivant à Paris, Aziz Chouaki fait une rencontre déterminante : celle du metteur en scène Jean-Pierre Vincent. « Vous écrivez du théâtre et vous ne le savez pas », lui dit ce dernier. En 1997, Chouaki écrit Les Oranges, qui devient un texte majeur du théâtre francophone. L’ouvrage retrace l’histoire de l’Algérie depuis 1830 jusqu’à la fin des années 1990. Il y évoquait « le jour où tous les gens de cette terre d’Algérie s’aimeront comme s’aiment les oranges ».

Marqué par ce jour où un ami lui dit qu’il est sur la liste « des gens à abattre », Aziz Chouaki gardait un rapport conflictuel avec l’Algérie. « Le terrorisme est terminé, mais les islamistes ont gagné la bataille sociale, la religion est ancrée partout », regrettait l’écrivain. Dans son livre L’Etoile d’Alger (2011), le héros, Moussa Massy, incarne ce que le dramaturge considérait comme un « gâchis monumental ». Le jeune homme rêve de devenir le Michael Jackson de l’Algérie, avant de finalement basculer dans l’islamisme. Ce livre a été traduit dans plusieurs langues et adapté au cinéma par le réalisateur Rachid Benhadj en 2016.

Il est possible de replonger dans l’univers poétique d’Aziz Chouaki, cet été. Avignon « off » rejoue sa pièce Esperanza, qui traite du drame des migrants clandestins. Elle avait été présentée à Avignon en 2017.