Le gouvernement refuse de ramener ses ressortissants, djihadistes et épouses, affiliés à l’EI, et n’a accepté jusqu’ici de rapatrier les enfants qu’au « cas par cas ». / Maya Alleruzzo / AP

Le juge des référés du Conseil d’Etat a rejeté en appel, mardi 23 avril, quatre demandes de rapatriement de ressortissantes françaises et de leurs enfants retenus en Syrie, jugeant que cette décision ne relevait pas de sa compétence mais de celle de la diplomatie française.

Trois d’entre elles émanaient de Françaises liées à l’organisation Etat islamique (EI) et retenues dans un camp en Syrie avec leurs huit enfants. Une dernière provenait de l’oncle de deux mineurs, âgés de deux et quatre ans, qui réclame à l’Etat de les rapatrier depuis un autre camp syrien, sous contrôle des forces kurdes, où ils vivent.

Compétence de la diplomatie

Après le rejet de leurs requêtes par le tribunal administratif de Paris qui avait invoqué le fait qu’il n’était pas compétent en la matière, elles avaient fait appel devant le juge des référés du Conseil d’Etat. Ce dernier a fait mardi un constat similaire à celui rendu par le tribunal administratif en estimant que les mesures de rapatriement demandées ne relevaient pas de la compétence d’un juge mais de la diplomatie.

« Les mesures ainsi demandées en vue d’un rapatriement, qui ne peut être rendu possible par la seule délivrance d’un titre leur permettant de franchir les frontières françaises, ainsi que cela a été demandé à l’audience, nécessiteraient l’engagement de négociations avec des autorités étrangères ou une intervention sur un territoire étranger », peut-on lire dans un communiqué du Conseil d’Etat.

« Le juge des référés du Conseil d’Etat en déduit que les mesures en cause ne sont pas détachables de la conduite des relations internationales de la France et qu’elles ne relèvent donc pas de la compétence d’un juge », peut-on lire dans ce communiqué résumant les quatre décisions rendues par le juge de la plus haute juridiction administrative française.

Plan de rapatriement au point mort

« Les familles sont confrontées à un déni de justice, bien que la situation ne fasse que s’aggraver », a regretté Me Nabil Boudi, avocat de l’oncle des deux mineurs. « Aujourd’hui, tout est verrouillé, que ce soit avec le Quai d’Orsay que du côté de la justice ».

Lors de l’audience, le juge des référés avait refusé de saisir pour avis la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), comme le réclamaient Me William Bourdon et Me Vincent Brengarth, les avocats de deux Françaises, Margaux D. et Estelle K., retenues dans le camp de Roj en Syrie avec chacune trois enfants, âgés entre un an et demi et huit ans.

Le gouvernement refuse de ramener ses ressortissants, djihadistes et épouses, affiliés à l’EI, et n’a accepté jusqu’ici de rapatrier les enfants qu’au « cas par cas ». Cinq orphelins sont ainsi revenus le 15 mars et une fillette de trois ans, dont la mère a été condamnée à la perpétuité en Irak, l’a été le 27 mars.

Des documents, révélés par Libération et dont l’AFP a eu connaissance, témoignent que les autorités françaises ont préparé un plan très détaillé de rapatriement global de djihadistes français de Syrie et de leurs familles. Celui-ci n’a toutefois pour l’heure pas été mis en œuvre.