Les Cassandre en sont de nouveau pour leurs frais et l’Amérique de Donald Trump triomphe : l’économie américaine s’est établie à 3,2 % en rythme annuel au premier trimestre 2019. C’est beaucoup mieux que les 2,5 % attendus par les économistes interrogés par le Wall Street Journal.

Le chiffre publié vendredi 26 avril est provisoire et peut encore être révisé ; il n’empêche, il confirme que le shutdown, la fermeture provisoire de l’administration fédérale au début de l’année, a occupé le Landerneau à Washington mais n’a pas affecté l’économie des cinquante Etats.

Les guerres commerciales de Donald Trump ont créé des inquiétudes, mais pas suffisamment pour se traduire en données macroéconomiques alors que Washington et Pékin cherchent un compromis. Enfin, les troubles extérieurs, comme le ralentissement de la Chine et le Brexit mal contrôlé, persistent, mais ils n’ont pas affecté la première économie de la planète. A dix-huit mois de l’élection présidentielle américaine, nul ne table désormais sur une récession économique rapide susceptible de faire battre Donald Trump, alors que la croissance avait atteint 2,9 % en 2018.

La chute des marchés financiers de décembre est oubliée, et Wall Street flirte de nouveau avec ses records historiques. En juillet, les Etats-Unis fêteront leurs dix années de croissance, le plus long cycle jamais accompli.

Quelques avertissements

Dans le détail, toutefois, le chiffre de la croissance comporte quelques avertissements. D’abord, un point de croissance s’explique par la hausse des exportations et le recul des importations. En période de guérilla commerciale, les chiffres sont erratiques – dans un sens comme dans l’autre – et invitent à la prudence.

Ensuite, elle a été dopée à hauteur de deux tiers de point par la constitution de stocks de la part des entreprises. Ce signal peut être positif (les entreprises anticipent des commandes et plus de croissance), mais peut se renverser si les entreprises ralentissent leur production et déstockent au deuxième trimestre.

Enfin, la croissance a été portée par les dépenses publiques. Hors ces trois éléments, la croissance due à la consommation n’a été que de 1,2 %, deux fois plus faible qu’au dernier trimestre, mais elle a rebondi en mars, selon un autre rapport. Le rythme des investissements des entreprises a reculé, en hausse de 2,7 % contre 5,4 % au quatrième trimestre 2018, mais les investissements en matière de propriété intellectuelle ont bondi de 8,6 %.

La publication de ce chiffre intervient alors que l’inflation est particulièrement basse. Les prix à la consommation ne progressent qu’au rythme de 0,6 % (contre 1,5 % fin 2018). Hors énergie et alimentation, ce chiffre n’est que de 1,3 %, bien en deçà de l’objectif de 2 %. L’affaire devrait conduire à l’attentisme de la Réserve fédérale, qui a suspendu en janvier son mouvement de hausse des taux.

Ce faisant, elle se prive d’une capacité pour baisser le loyer de l’argent en cas de retournement conjoncturel. Elle ne devrait pas non plus juger nécessaire de diminuer le loyer de l’argent, comme l’a exigé d’elle Donald Trump.