Les actionnaires de Bayer ont infligé au groupe chimique allemand un rare désaveu, vendredi 26 avril, en votant contre sa direction, lors d’une assemblée générale tenue moins d’un an après le coûteux – 63 milliards de dollars – rachat de Monsanto en juin 2018. Ils ont rejeté à 55,5 % les « actions du directoire » emmené par le PDG Werner Baumann, qu’ils avaient plébiscité l’an dernier avec 97 % d’approbation.

Cernée par plusieurs centaines de manifestants écologistes, l’assemblée générale s’est tenue vendredi à Bonn dans un climat inhabituellement houleux, la chute du cours de Bourse alimentant 13 heures de débats.

La direction de Bayer est devenue l’incarnation de l’herbicide controversé depuis son rachat de Monsanto. Face aux critiques sur sa stratégie, Werner Baumann a une nouvelle fois défendu son pari historique de débourser 63 milliards de dollars pour acquérir le géant américain des semences et des OGM Monsanto, après deux ans d’efforts pour convaincre les autorités de la concurrence. A long terme, Bayer table sur le soutien croissant de la chimie à l’agriculture pour nourrir une population mondiale toujours plus nombreuse, alors que le changement climatique perturbe déjà les terres arables.

Bayer « demeure optimiste » sur le front judiciaire

Mais la lune de miel des deux groupes a coïncidé avec deux condamnations retentissantes prononcées aux Etats-Unis en raison du caractère « cancérogène » de l’herbicide au glyphosate de Monsanto, le RoundUp, qui ont ouvert la voie à quelque 13 400 requêtes similaires.

Bayer « demeure optimiste » sur le front judiciaire, et espère que les cours d’appel saisies dans les deux premiers dossiers américains « rendront des décisions différentes », « basées sur l’analyse scientifique et non sur l’émotion », a assuré Werner Baumann. « Nous demeurons convaincus du caractère sûr du glyphosate. »

« La direction de Bayer a totalement sous-estimé les risques juridiques de son accord avec Monsanto », critiquait vendredi Janne Werning, du fonds Union Investment, citée par l’agence allemande DPA.

Cette pluie de procédures, après deux condamnations en quelques mois à verser au total 158,8 millions de dollars d’indemnités, a contribué à faire plonger le titre Bayer de près de 40 % en Bourse depuis l’acquisition de Monsanto en juin 2018.