L’avis du « Monde » – pourquoi pas

Pour son premier long-métrage, Ixcanul (2015), le cinéaste guatémaltèque Jayro Bustamante s’était installé sur les pentes d’un volcan, dans les plantations de café. Il est revenu en ville, à Ciudad de Guatemala, la capitale, pour Tremblements, récit façonné par les mutations de son pays, mais aussi enfermé dans le carcan de son sujet.

Celui-ci tient à l’emprise croissante des dénominations évangéliques sur la population du Guatemala. Dans la bourgeoisie, le confesseur catholique a cédé sa place (sans doute de mauvaise grâce) au pasteur, qui bénit la réussite matérielle, manifestation de la grâce divine, tout en prélevant sa dîme. Lorsque l’on rencontre Pablo (Juan Pablo Olyslager), il vient de commettre la pire transgression imaginable dans cet ordre des choses : il a quitté femme et enfants pour un homme. Francisco vit dans un quartier bohème, dans un inconfort que son nouvel amant n’aurait sans doute jamais imaginé.

Rythme d’une cérémonie funéraire

Derrière lui, Pablo a laissé une épouse inflexible, des parents accablés de culpabilité, une belle famille revancharde. L’essentiel de Tremblements est consacré à l’élaboration de la contre-offensive qui vise moins à punir le pécheur qu’à effacer sa faute en le réintégrant après une nécessaire expiation. Ce qui passe par les « thérapies » déjà décrites par le cinéma gringo, par la soumission de la famille de Pablo à celle de son épouse.

Sans doute pour donner à Tremblements un peu du puissant naturalisme qui irriguait Ixcanul, Jayro Bustamante a rythmé son film de secousses sismiques, menace permanente dans la région. Ce n’est pas assez pour animer un film qui bientôt prend le rythme d’une cérémonie funéraire. Cette sensation pesante tient aux limites de l’interprète principal, qu’on ne voit jamais qu’affligé, mais aussi à un scénario qui procède par séquences dont l’enjeu est annoncé dès le premier plan et n’est jamais remis en cause. La tragédie prend alors la densité du plomb et la sensibilité que l’on devrait éprouver face à des situations paroxystiques est comme anesthésiée.

TREMBLEMENTS de Jayro Bustamante : BANDE-ANNONCE OFFICIELLE / TRAILER
Durée : 01:52

Film français, guatémaltèque et luxembourgeois de Jayro Bustamante. Avec Juan Pablo Olyslager, Diane Bathen, Mauricio Armas Zebadua (1 h 47). Sur le Web : distribution.memento-films.com/film/infos/97