Viviane Lambert, la mère de Vincent Lambert, aux côtés de son avocat Jérôme Triomphe, lors d’une audience à la Cour des droits de l’Homme à Strasbourg, le 5 juin 2015. / Christian Lutz / AP

Le Comité international des droits des personnes handicapées de l’ONU (CIDPH) a demandé à la France de suspendre toute décision d’arrêt des soins de Vincent Lambert, dans l’attente d’une instruction sur le fond, a-t-on appris samedi 4 mai auprès des avocats des parents.

Cette annonce intervient quatre jours après que la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) avait, elle, ouvert la voie à l’arrêt des soins de Vincent Lambert, hospitalisé à Reims dans un état végétatif depuis 10 ans, en rejetant la demande de suspension d’une décision du Conseil d’Etat. « La requête a été enregistrée et l’instruction commence devant ce comité international », une procédure qui dure « en pratique plusieurs années », a assuré Me Jérôme Triomphe, l’un des avocats des parents.

L’Etat français dispose de six mois pour fournir ses observations au comité. En attendant, ce dernier demande à la France de veiller à ce que l’alimentation et l’hydratation de Vincent Lambert ne soient pas suspendues, en vertu de la convention relative aux droits des personnes handicapées. « C’est une grande satisfaction : enfin une instance spécialisée va pouvoir se prononcer sur le fond de l’affaire. Est-ce qu’il est normal qu’on tue une personne handicapée au motif qu’elle est handicapée ? (…) Est-ce qu’il est à sa place dans un service de soins palliatifs, enfermé à clé dans une chambre (…) ou est-ce que sa place est dans une unité spécialisée ? », a déclaré Me Triomphe.

Une famille déchirée

Il a également dit son « grand soulagement » car « il y a depuis plus d’un an un acharnement judiciaire et médical à faire mourir Vincent ». Ancien infirmier psychiatrique de 42 ans, Vincent Lambert se trouve en état végétatif à la suite d’un accident de la route en 2008. Les décisions sur un arrêt des soins n’ont jamais été mises en œuvre, freinées par de multiples imbroglios et recours juridiques successifs.

L’affaire, devenue un symbole du débat sur la fin de vie en France, déchire sa famille depuis six ans : d’un côté, les parents, un demi-frère et une sœur s’opposent à l’arrêt des soins ; de l’autre, son épouse Rachel, son neveu François et cinq frères et sœurs du patient dénoncent un acharnement thérapeutique.

L’avocat de François Lambert, Me Gérard Chemla, a déploré une demande « épouvantable ». « Ce comité théodule vient rejuger » une nouvelle fois cette affaire, « et au nom des droits de l’Homme, bafoue les droits d’un homme qui souffre gratuitement depuis des années (…) ». « Je trouve insupportable qu’aujourd’hui, plus de 10 ans après l’accident, on puisse encore en être là (…) Il y a un moment où les choses doivent s’arrêter. »

François Lambert a pour sa part dénoncé « un simulacre ». Le comité « se fait de la publicité sur le dos de Vincent, il n’a aucune autorité car il a juste le moyen de donner un avis. Sa position est indéfendable », a-t-il déploré. Cette annonce apparaît comme un nouveau rebondissement alors que la CEDH avait rejeté mardi la requête des parents qui contestaient la décision du Conseil d’Etat de suspendre les soins.