OCS City

Mardi 7 - 20 h 40

Mini-série

Un homme seul, la nuit, le 26 avril 1988, à Moscou, enregistre sur un magnétophone à cassette ce qui se révèle bientôt être un testament sans pitié à propos de ce qui s’est passé la nuit du 25 au 26 avril 1986 à la centrale de Tchernobyl, en Ukraine, dont le cœur d’un réacteur entrait en fusion. Avec les conséquences qu’on sait, qui marqueront d’une pierre noire l’histoire de l’énergie nucléaire.

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L’homme, dont les propos sont sans pitié envers ceux qu’il juge responsables de cette catastrophe majeure et effrayante, empaquette ses enregistrements dans du papier journal, les dépose dans une cache à l’extérieur de sa maison, respire quelques instants l’air frais avant d’allumer une cigarette. Ce sera la dernière, celle de celui qui s’autocondamne à la pendaison, après avoir donné à manger à son chat.

Six minutes glaçantes en guise de prologue

Ces quelque six minutes, glaçantes, constituent le prologue de la mini-série Chernobyl, créée par Craig Mazin (qui en est également le scénariste), que diffuse OCS le 7 mai, au rythme d’un épisode hebdomadaire, 24 heures après Sky au Royaume-Uni, et HBO aux Etats-Unis, qui en ont coproduit les cinq parties.

Un carton inséré nous apprend ensuite qu’on se retrouve « Deux ans et une minute auparavant », alors même que, à 1 heure 23, l’impensable se produit. Certains parmi les scientifiques à l’œuvre dans la salle des commandes de Tchernobyl comprennent vite. Mais leurs chefs, dans leur grande habitude du déni et de la censure officielles, refusent la réalité, alors que, dedans et dehors, les employés et les pompiers vomissent puis se voient gagnés par d’effrayantes lésions corporelles.

Le premier épisode a tout du genre catastrophe – sous-tendu par une musique électronique aux relents angoissés – avec des images trompeusement poétiques, qui annoncent bien sûr le pire : ainsi ces particules qui volètent dans la trace projetée des phares des camions de pompiers, ou ce bébé à qui l’on fait prendre le frais dans un air qu’on ne sait pas encore qu’il est léthalement empoisonné.

Machine à mensonges officiels

Très vite, on comprend que le déni des hauts responsables de la centrale va se transmettre aux instances dirigeantes du pays : ils vont mettre en branle la machine à mensonges officiels dont les fausses informations feront de nombreux morts et mettront gravement en danger des millions de personnes.

La principale réserve que nous fait formuler le début de cette mini-série est à propos de l’utilisation de l’anglais par les personnages ukraino-soviétiques – joués par des acteurs venus d’Albion qui se donnent du « camarade » avec le plus bel accent d’Oxford. C’est une convention qui n’est pas nouvelle, mais qui paraît souvent un peu ridicule (on se souvient de la série « internationale » Versailles...)

Dans Chernobyl, l’artifice supplémentaire qui consiste à donner un accent russe à la langue anglaise parlée aura au moins été évité. Mais que cela rend artificiels les dialogues entre soviétiques au fond de leur cuisine miteuse, dans les sous-sols de la centrale ou en réunion sous le portrait du camarade Lénine, dont le nom avait été donné à la centrale nucléaire.

L’image, filmée en tons sous-saturés, est prenante, poisseuse ; l’atmosphère sourde, menaçante, glauque à souhait. Elles reconstituent de manière convainquante une URSS parvenue à ses derniers souffles dans la glasnost balbutiante.

Chernobyl, série créée et écrite par Craig Mazin (Royaume-Uni, Etats-Unis, 2019, 5 x 60-83 min.)