A Paris, le 9 mai. / THOMAS SAMSON / AFP

De nombreux enseignants ont encore répondu, jeudi 9 février, à l’appel à la grève lancé dans toute la fonction publique. Dans le premier degré (écoles maternelles et élémentaires), 17 % des enseignants étaient en grève selon le ministère, un peu plus de 30 % selon les syndicats.

Au collège et au lycée, ils étaient 11 % selon les chiffres officiels, mais le SNES-FSU (majoritaire dans le second degré) évoquait en fin de journée 35 % de grévistes. Le syndicat s’est félicité dans un communiqué de cette mobilisation « contre les conditions catastrophiques de préparation de la rentrée 2019, contre la réforme des lycées et du baccalauréat, contre la loi Blanquer, pour la revalorisation des salaires ». Du côté du SGEN-CFDT, on évoque une mobilisation « moyenne », en tout cas moins spectaculaire que celle du 19 mars, où 41 % des enseignants du primaire étaient en grève, selon les syndicats (24 % selon le ministère).

Dans le cortège parisien, les enseignants étaient nombreux lors de la manifestation des fonctionnaires sous les bannières de la FSU, de SUD-Education ou encore de la CFDT. Parmi les enseignants grévistes, ce sont bien les problématiques proprement scolaires qui ont mobilisé. Sous des bannières portant les traditionnels « Non à la loi Blanquer » à côté de noms d’écoles et de lycées de l’Est parisien, ou de Seine-Saint-Denis, les enseignants réclamaient pêle-mêle « l’abandon de la loi Blanquer » et celui de la réforme du bac et du lycée.

Le compte-rendu de la mobilisation : Des dizaines de milliers de fonctionnaires ont manifesté

« Accroissement des inégalités »

Camille (qui souhaite rester anonyme, comme les autres personnes interrogées), professeur de SES au lycée Olympes-de-Gouges de Noisy-le-Sec, s’est déplacé avec plusieurs collègues. Il dénonce le nouveau système des spécialités qui doit remplacer dès la rentrée 2019 les filières S, ES et L. Selon lui, le nouveau lycée s’achemine vers un « accroissement des inégalités entre les élèves », notamment dans l’accès à la spécialité mathématiques, qui disparaît du tronc commun. Une enseignante d’histoire-géographie du même établissement s’inquiète, elle, des difficultés à venir dans l’orientation des secondes, en particulier pour « les élèves issus de milieux défavorisés, qui ne peuvent pas compter sur leurs parents pour les aider à s’orienter ».

Les enseignants du primaire, eux, rejettent en bloc la « loi Blanquer ». Le texte, qui sera débattu la semaine prochaine en séance publique au Sénat, ne passe pas. « L’article 1 », qui rappelle le devoir « d’exemplarité » des enseignants, est sur toutes les bouches. Il est perçu comme une volonté de museler les enseignants. « Tout est flou dans cette loi, assure une enseignante remplaçante de l’Essonne. Et quand tout est flou, tout peut être interprété : dès qu’on critiquera quelque chose, on pourra être sanctionné. » Nathalie, enseignante en CM1 à Ivry-sur-Seine, a en tête différents exemples souvent cités, comme celui d’un directeur d’école de l’Hérault, rappelé à l’ordre par sa direction académique pour avoir critiqué la loi Blanquer au micro de France Bleu. « Il y a un autoritarisme très fort », dénonce l’enseignante.

Les enseignants de collège se mobilisent sur les mêmes thématiques. Flavien, professeur de SVT au collège Guy Moquêt de Gennevilliers (Seine-Saint-Denis) sait que le collège est peu touché par les réformes. Mais il se dit « solidaire » de ses collègues, et préoccupé, au même titre qu’eux, par l’article 1 de la loi Blanquer. « Quand on fait une critique, ce n’est pas contre le gouvernement, c’est pour l’intérêt de nos élèves, défend-il. La loi prévoit déjà le devoir de réserve des fonctionnaires, à quoi cela peut-il bien servir d’ajouter cet article, sinon à nous empêcher de nous exprimer ? » Alors que la séance publique s’ouvrira le 14 mai au Sénat, l’article 1 fait l’objet de plusieurs amendements de suppression.