Edouard Philippe était présent samedi 11 mai au meeting pour les Européennes de Nathalie Loiseau, à Strasbourg. / FREDERICK FLORIN / AFP

Après deux ans dans une fonction jugée parmi les plus éprouvantes de la politique, le Premier ministre Édouard Philippe se confie, dans un entretien publié dans Le Figaro dimanche 12 mai, sur les difficultés rencontrées par le gouvernement et sur les prochaines réformes.

  • Les « gilets jaunes » et les 80 km/h

Le premier ministre souhaite que « le désordre [entraîné par les manifestations des “gilets jaunes” depuis près de 6 mois] cesse », estimant que le gouvernement a déjà apporté « des réponses fortes à la colère et à la demande de considération de ces concitoyens ». Une analyse que ne partageait pas l’une des figures du mouvement contestataire, Maxime Nicolle – alias « Fly Rider » –, interrogé par l’AFP après l’allocution d’Emmanuel Macron jeudi 25 avril : « il vient de balancer quelques miettes de pain comme la réindexation des retraites. [Mais] il n’a pas écouté ce qu’on a dit dans la rue depuis cinq mois ».

D’autant que le gouvernement affiche sa volonté de maintenir le cap, notamment sur l’une des réformes qui avaient suscité la colère des motards et les automobilistes, avant la hausse de la taxe carbone : l’abaissement de la vitesse maximale autorisée sur les routes secondaires à 80 km/h. Une mesure chère à Edouard Philippe, sur laquelle il n’entend pas revenir : « Je suis attaché à tout ce qui peut garantir le plus haut niveau de sécurité routière. Nous avons sauvé des vies, et j’en suis fier, affirme-t-il au Figaro. En 2018, nous avons obtenu les meilleurs résultats de l’histoire de la sécurité routière. Cela représente tout de même encore plus de 3 200 morts ». Le premier ministre ouvre toute fois la porte à un assouplissement de cette loi, si elle est voulue par le Parlement :

« Le président a pris des engagements, la majorité voudra se faire entendre, il y aura un débat parlementaire et on trouvera sans doute une excellente solution. Elle devra passer par une vraie prise en compte des impératifs de sécurité routière. »
  • la réduction du nombre de fonctionnaires

Dans son entretien au Figaro, Edouard Philippe souligne qu’il n’a « pas de dogme » quant au nombre souhaitable de fonctionnaires, après qu’Emmanuel Macron a évoqué le possible abandon de l’objectif de 120 000 suppressions de postes d’ici à 2022.

« On les augmente là où il y a des besoins, comme dans la police ou les armées, et on supprime des postes là où les besoins changent, comme aux impôts », a affirmé Philippe à la veille de l’examen du projet de réforme de la fonction publique par les députés. « Je crois profondément qu’on peut réformer l’État, conserver, voire améliorer la qualité de service public tout en diminuant le nombre de fonctionnaires », ajoute le chef du gouvernement.

  • l’« enfer » de Matignon et son rapport au président

Le premier ministre refuse de comparer, comme ses prédécesseurs, sa responsabilité à un « enfer », « un poste immensément frustrant », ou au « bail le plus précaire de la République ». « Je ne dis pas que c’est facile, reconnait-il. C’est une responsabilité exigeante que je prends très au sérieux et que j’exerce avec humilité. Mais quand vous avez l’honneur de servir le pays à ce niveau de responsabilité, de diriger une telle équipe gouvernementale, dire que c’est un enfer, c’est inacceptable ».

Une manière de signifier qu’il compte rester encore longtemps à ce poste ? « La décision ne m’appartient pas, s'exclame-t-il. Je considère qu’un premier ministre est à Matignon aussi longtemps que trois conditions sont rassemblées : la confiance du président, le soutien de la majorité parlementaire et la volonté de faire. À mes yeux, elles sont pleinement réunies. »