Des gardes-côtes yéménites dans le port de Salif, dans la province occidentale de Hodeida (Yémen), après le retrait des combattants rebelles, le 13 mai 2019. / - / AFP

Les Nations unies ont confirmé, mardi 14 mai, que les rebelles houthistes avaient remis à des gardes-côtes le contrôle de trois ports de la région stratégique de Hodeida (ouest), conformément à l’accord interyéménite signé fin 2018, dont la mise en œuvre reste toutefois semée d’embûches.

« Il reste encore beaucoup de travail à faire pour éliminer les signes [de présence militaire], mais la coopération a été très bonne », s’est félicité le président du Comité de coordination des redéploiements, le général danois Michael Lollesgaard, dans un communiqué.

Les houthistes avaient annoncé samedi le début de leur retrait des ports de Hodeida, Salif et Ras Issa, au centre d’un bras de fer depuis 2018 avec la coalition progouvernementale soutenue par Riyad et Abou Dhabi.

Les forces loyalistes avaient toutefois aussitôt dénoncé une « manipulation », accusant les houthistes de remettre le contrôle à des gardes-côtes qui leur sont favorables. L’ONU n’a fourni aucune indication sur la composition de cette « garde côtière » à laquelle les rebelles ont transféré « la sécurité des ports ».

Meilleure chance de faire progresser la paix

Le retrait des houthistes de ces trois ports – dont celui d’Hodeida, crucial pour l’arrivée des importations et de l’aide humanitaire dans ce pays en guerre – fait partie d’un accord de redéploiement des belligérants dans la région, conclu en décembre lors de pourparlers sous l’égide de l’ONU en Suède.

Des membres de la Mission des Nations unies chargée de soutenir l’accord de Hodeida ont constaté le redéploiement de rebelles houthistes, « en partie comme convenu dans le cadre de la première phase » du redéploiement, est-il précisé dans le communiqué. Le gouvernement yéménite, de son côté, « s’est engagé à exécuter sa part de la phase 1 [des redéploiements] à la demande de l’ONU », avait indiqué la Mission des Nations unies dimanche, sans autres détails.

Mardi, M. Lollesgaard a appelé les deux camps à « finaliser les négociations en suspens pour permettre la mise en œuvre complète des phases 1 et 2 de l’accord d’Hodeida ». « Ces étapes sont significatives dans le cadre de la première phase du redéploiement à Hodeida, [accord] auquel les deux parties continuent d’exprimer leur engagement », est-il encore indiqué dans le communiqué.

Selon Adam Baron, analyste associé au Conseil européen pour les relations internationales (ECFR), la mise en œuvre de l’accord à Hodeida ne témoigne de progrès que sur « un aspect du conflit ». L’accord de désengagement à Hodeida n’en reste pas moins la meilleure chance à ce jour de faire progresser la paix au Yémen, selon des experts.

Annoncé à plusieurs reprises par les Nations unies, le retrait effectif des belligérants a tardé à être mis en œuvre, inquiétant la communauté internationale. Samedi, la Mission des Nations unies chargée de soutenir l’accord de Hodeida avait indiqué que l’ONU procéderait à une « vérification formelle » de ce premier redéploiement ce mardi. « Au cours des prochains jours, les activités [dans les ports] devraient être axées sur l’élimination » des équipements « militaires et le déminage », avait ajouté la Mission.

Tensions accrues dans le Golfe

Le Conseil de sécurité de l’ONU doit se pencher mercredi sur la question de Hodeida, dans un contexte de tensions accrues dans le Golfe après des « actes de sabotage » contre quatre navires dont deux tankers saoudiens dimanche au large des Emirats arabes unis. Mardi, des drones ont attaqué des installations pétrolières en Arabie saoudite. Il s’agit d’une « réponse aux crimes » de Riyad au Yémen, a déclaré Mohammed Abdelsalam, porte-parole des houthistes, soutenus par l’Iran.

La guerre au Yémen oppose depuis plus de quatre ans des forces gouvernementales aux rebelles, qui contrôlent de vastes zones de l’ouest et du nord du Yémen dont la capitale, Sanaa. Elle a tué des dizaines de milliers de personnes, dont de nombreux civils, selon diverses organisations humanitaires. Environ 3,3 millions de personnes sont déplacées et 24,1 millions, soit plus des deux tiers de la population, ont besoin d’assistance, selon l’ONU.

Le processus lancé en Suède, le premier depuis 2016, avait suscité des espoirs, les parties ayant conclu une trêve qui semble à peu près tenir à Hodeida, ainsi qu’un accord pour la libération de milliers de prisonniers. Cependant, ces libérations n’ont toujours pas eu lieu. Selon des experts, cet accord reste très difficile à exécuter en raison de ses lignes « floues » et du « manque de confiance » entre les deux parties.

Guerre au Yémen : pourquoi le pays est en train de disparaître
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