Une manifestation dans le village basque espagnol de Miraballes, après l’arrestation en France de Josu Ternera, le 16 mai 2019. Les manifestants demandent « liberté pour Josu ». / ANDER GILLENEA / AFP

« La réconciliation politique ne vaut pas amnistie », a estimé le président français, Emmanuel Macron, vendredi 17 mai, au lendemain de l’arrestation de Josu Ternera, l’un des plus influents chefs de l’organisation séparatiste basque dissoute Euskadi Ta Askatasuna (ETA), interpellé jeudi à Sallanches (Haute-Savoie).

Josu Ternera a été conduit vendredi au parquet de Paris, après avoir été arrêté en vertu d’un mandat d’arrêt français émis après sa condamnation par défaut en 2017 par le tribunal correctionnel de Paris, à huit ans de prison pour « participation à une association de malfaiteurs terroriste ».

Il doit ensuite être présenté à un juge des libertés et de la détention qui doit statuer sur son éventuelle incarcération, a précisé le parquet. Etant donné que la condamnation en 2017 a été prononcée en son absence, Josu Ternera a la possibilité de demander à être jugé à nouveau. Sinon, la peine sera exécutée.

« Enchaîné au passé »

Le collectif basque Bake Bidea (« Chemin de la paix »), qui se présente comme un « mouvement civil en faveur du processus de paix », a estimé jeudi que cette arrestation était une « insulte dans le contexte actuel ». « Les Etats français et espagnol n’assument pas de façon responsable les avancées décisives réalisées ces huit dernières années, sous l’impulsion d’une société civile basque refusant d’être enchaînée au passé », a déploré le mouvement, rappelant, au passage, que Josu Ternera avait été la voix lisant le communiqué annonçant la dissolution de l’organisation séparatiste, en mai 018.

Chef historique d’ETA de 1977 à 1992, élu député en 1998 d’Herri Batasuna (parti nationaliste radical) aujourd’hui dissous, Josu Ternera, 68 ans, avait échappé à une précédente tentative d’arrestation en France en 2013.

De son vrai nom José Antonio Urrutikoetxea Bengoetxea, l’ancien no 1 de l’organisation a été tour à tour l’inspirateur d’une stratégie d’attentats meurtriers puis le promoteur de négociations de paix avec l’Etat espagnol, avant d’être écarté de la direction du groupe.

Il était passé dans la clandestinité en 2002 pour échapper aux poursuites pour son rôle dans un attentat contre une caserne de la garde civile à Saragosse, dans le nord de l’Espagne, qui avait fait onze morts dont cinq enfants en 1987. Selon l’Audience nationale, haut tribunal basé à Madrid, il est également recherché pour son implication présumée dans l’assassinat, en 1980, d’un cadre du groupe Michelin en Espagne.

« J’ai été, je suis et je serai toujours membre d’ETA »

Josu Ternera est considéré comme l’instigateur de la stratégie d’attentats à la voiture piégée adoptée par ETA dans les années 1980. Selon les experts de la lutte antiterroriste, il avait aussi mis sur pied le commando « itinérant » d’ETA formé de militants français, qui a été le plus meurtrier de l’organisation.

Ternera avait rejoint ETA vers la fin des années 1960, pendant la dictature de Francisco Franco, et s’était réfugié en France dans les années 1970. Chef d’ETA de la fin des années 1970 jusqu’à son arrestation en France, en 1989, il avait fini par être écarté de l’état-major en 2006 par les plus radicaux de l’organisation.

Après avoir établi des contacts avec le gouvernement espagnol en vue de négociations de paix dès les années 1980, il avait joué un rôle de premier plan dans les discussions tenues avec le gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero à partir de 2005. En 1990, Ternera avait été condamné par la justice française à dix ans de prison et à cinq ans d’interdiction de séjour pour « association de malfaiteurs ». « J’ai été, je suis et je serai toujours membre d’ETA, je suis fier de l’être », avait-il déclaré lors de son procès.

Pourquoi la dissolution d’ETA gêne-t-elle le gouvernement espagnol ?
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