« Faidherbia albida », cousin de l’acacia, au Mali. / DR

Il optimise le rendement des cultures, nourrit de ses feuilles les troupeaux du Sahel et s’érige en rempart à la désertification : Faidherbia albida, cousin majestueux de l’acacia, porte sur ses branches une partie du salut des paysans africains.

« C’est vraiment le parc agroforestier le plus emblématique d’Afrique subsahélienne », explique Christian Dupraz, directeur de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA) et président du comité scientifique du Congrès mondial d’agroforesterie organisé du 20 au 22 mai à Montpellier.

Coton, sorgho, mil, arachide, entre autres, sont des cultures qui poussent sous ses branches, selon M. Dupraz. Il peut grimper jusqu’à une trentaine de mètres pour un tronc dont le diamètre peut atteindre 1,30 m, voire davantage.

Mais ce qui impressionne le plus, explique Régis Peltier, ingénieur de recherche et développement au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad), c’est l’amplitude de ses branches aux rameaux épineux.

« Son tronc unique à la base pousse en formant une vaste couronne », explique M. Peltier, basé à Montpellier mais qui a piloté des essais dans le nord du Cameroun dès les années 1980 pour le Cirad. « Il y a pas mal d’endroits où l’on voit des petits marchés hebdomadaires qui se font sous un vieux Faidherbia. Ça peut faire l’équivalent d’un demi-terrain de foot. »

Sa majesté ne serait rien sans une particularité qui le distingue des autres arbres de la région : « Il a un effet bénéfique sur le rendement de la plupart des cultures, même sous sa couronne, ce qui en fait un cas d’école », explique à l’AFP Olivier Roupsard, chercheur du Cirad, installé depuis 2017 au Sénégal.

Rendement

Cet effet tient notamment à « sa phénologie inversée », détaille M. Roupsard : « Il est feuillé en saison sèche, quand il n’y a plus de cultures dans les champs et permet de nourrir les animaux grâce à son fourrage et à ses gousses très riches, justement quand la nourriture n’est plus disponible dans les pâturages. Les troupeaux qui profitaient des pâturages en saison des pluies peuvent migrer vers les zones à Faidherbia en saison sèche et y survivre durant cette saison très difficile. Au passage, ils défèquent sous ces arbres en enrichissent le sol, ce dont les cultures profiteront au cycle suivant. »

A l’inverse, lorsque revient la saison des pluies et des cultures, il se défeuille entièrement et permet aux cultures d’être correctement nourries par les pluies et la lumière. Le rendement de mil sous les Faidherbia, mesuré en 2018, était trois fois supérieur sous les couronnes qu’en plein soleil.

Jeune plant de « Faidherbia albida », cousin de l’acacia, au Sénégal. / SEYLLOU DIALLO/AFP

Pour Régis Peltier, il faut subventionner de nouvelles campagnes de plantations afin de permettre aux paysans qui pratiquent une agriculture de subsistance et vivent chichement de subvenir à leurs besoins, sachant qu’un arbre met une vingtaine d’années pour atteindre une taille et un rendement de fourrage suffisants. Face au constat dramatique de la disparition des forêts, notamment des forêts sèches, l’arbre en agroforesterie semble être le dernier rempart à la désertification en cours.

« Une inconnue subsiste toutefois, souligne-t-il M. Roupsard, cette espèce, très gourmande en eau souterraine ne peut se développer que si une nappe phréatique est accessible. » Augmenter sa densité n’est donc pas sans conséquence. « Nous travaillons donc aussi sur ce compromis important », conclut le chercheur.