Sur la saison 2018-2019, le PSG a perdu les coupes, périclité en Ligue des champions et accumulé les déboires : nouvelle blessure de Neymar, tensions dans l’organigramme, recrutement bancal et doutes sur la solidité de l’institution. / AP/Christophe Ena

Lille, Rennes, Saint-Etienne : on a vite fait le tour des clubs français dont les supporters peuvent fêter la saison 2018-2019. La résurrection du Losc de Christophe Galtier l’a porté à la deuxième place du championnat ; ses parcours en coupes d’Europe et de France ont offert au Stade rennais des émotions et surtout un titre espéré depuis 1971 ; l’ASSE a reconquis son public et une place européenne.

Ailleurs, chez les « gros » clubs, on mesure surtout la profondeur du marasme. Le Paris-Saint-Germain, champion triste, a perdu les coupes, périclité en Ligue des champions et accumulé les déboires : nouvelle blessure de Neymar, tensions dans l’organigramme, recrutement bancal et doutes sur la solidité de l’institution…

Paris est cette « locomotive » espérée pour la Ligue 1, qui a décroché ses wagons mais s’essouffle encore sur la côte de la Ligue des champions.

Tout sauf du « sportif »

Des investissements exorbitants ne font pas un projet sportif. Ce n’est pourtant pas la faute du PSG si ses challengers présumés ont fait la course avec des semelles de plomb : il profite d’une situation très analogue à celle de l’Olympique lyonnais au temps de son hégémonie, quand ses concurrents naturels – le PSG et l’OM – touchaient plus le fond que les bénéfices de leurs investissements.

A Monaco, le « trading de joueurs » a confirmé sa part de risque, faisant passer l’ASM d’une place de demi-finaliste de Ligue des champions à une position de relégable en moins de deux saisons. Fiasco de Thierry Henry sur le banc, aller-retour ubuesque de Leonardo Jardim, limogeage du vice-président Vadim Vasilyev, mercato d’hiver acrobatique : le négoce de footballeurs ne fait pas, non plus, un projet sportif. Ni un Ebitda (bénéfice avant intérêts, impôts et taxes) flatteur.

A priori plus solide, l’« institution OL » a tangué en prolongeant à l’excès une gouvernance qui touchait à ses limites depuis plusieurs saisons. Le divorce avec une large partie du public lyonnais s’est cristallisé autour de l’entraîneur, Bruno Genesio, jugé inapte à tirer parti d’un effectif pourtant riche, compromettant sa valorisation en même temps que les résultats.

On a aussi échoué à trouver du « sportif » dans l’« OM Champions Project », et les slogans des PowerPoint du président Jacques-Henri Eyraud ont sonné aussi creux que le Vélodrome certains soirs. La médiocrité du jeu marseillais, l’absence de qualification européenne ont finalement conduit à la déprime des supporters et à une disqualification tardive de Rudi Garcia… dont le contrat avait été prolongé en cours de saison. Tout est à refaire.

« Désorganigramme »

Ce diagnostic lapidaire pointe des gouvernances déficientes et leur incapacité à traduire les ambitions en résultats, ou simplement en stabilité. Un problème ancien dans le football français, qui devrait songer à former des dirigeants à la hauteur des joueurs sortant de ses centres. De ce point de vue, les intersaisons de Rennes et Saint-Etienne semblent déjà perpétuer la tradition du « désorganigramme » – Lille étant pour sa part menacé d’un syndrome monégasque.

Le bilan global affiche d’autres indicateurs inquiétants. Le coefficient UEFA des clubs est le plus mauvais depuis 2013-2014. Les affluences ont stagné (22 800 spectateurs en moyenne contre 22 500 la saison précédente), ne traduisant ni effet Coupe du monde, ni effet nouveaux stades. Et encore faut-il accorder crédit à des chiffres officiels qui ont compté les abonnés quand ceux-ci ne venaient pas.

Autre mirage dissipé : l’arrivée d’investisseurs étrangers n’a pas d’effets magiques. A Bordeaux, le chantier commence sur des décombres, tandis que Nice connaît des remous actionnariaux et que Nantes a subi le naufrage du projet « YelloPark ». Waldemar Kita, qui a du mal à stabiliser son banc, n’aurait pas dû s’aventurer dans la construction d’un stade.

De l’espoir, il y en a ici et là. La Ligue a amorcé une démarche volontariste pour remettre en cause la gestion absurde des supporters. Le football français doit aussi se poser la question de la qualité de ses entraîneurs, qu’on défend très mal en prônant une préférence nationale. La petite révolution lyonnaise, avec le pari du duo brésilien Juninho-Sylvinho, sera à suivre.

L’été ne devrait pas être seulement animé par le marché des transferts, mais aussi par une remise en cause des structures et de leur fonctionnement à Paris, Marseille, Monaco et Lyon. On écrit « devrait » au sens d’une nécessité autant que d’une hypothèse… Il est temps que les modèles économiques définissent de vrais projets sportifs. Temps de faire de meilleurs choix – en espérant que les audits ont enfin été menés.