Johanna Konta après sa victoire contre Sloane Stephens, en quarts de finale de Roland-Garros, le 4 juin. / REUTERS/Kai Pfaffenbach

A la veille de son premier tour à Roland-Garros, lundi 27 mai, Johanna Konta a attrapé un vilain rhume, qui l’avait rendue presque aphone ces derniers jours. La Britannique a bien cru que son allergie à la terre battue parisienne la reprenait : en quatre participations, elle n’y avait jamais remporté le moindre match. Dix jours plus tard, elle a vaincu ses vieux démons, cinq adversaires et son état grippal, et gagné du même coup le droit de disputer les demi-finales.

Mardi 4 juin en quarts, elle a foudroyé en 1 h 10 la finaliste de 2018, Sloane Stephens, 7e mondiale (6-1, 6-4). La 26e joueuse mondiale s’est appuyée sur son service intraitable : une seule balle de break concédée et aussitôt effacée. Avant l’Américaine, Konta avait écarté méthodiquement en huitième la Croate Donna Vekic (24e) et au 3e tour la Slovaque Viktoria Kuzmova, qui avait bénéficié de l’abandon de la favorite néerlandaise Kiki Bertens.

En cinq matchs, Konta n’a laissé filer qu’un petit set. Pas trop mal pour une joueuse qui mordait la poussière depuis le début de sa carrière : « Je n’ai jamais douté de mes capacités sur cette surface, répète-t-elle à chacune de ses apparitions devant la presse depuis le début de la quinzaine. Il fallait que je mette certaines choses en place pour qu’elles aillent dans mon sens. C’est aussi dû à la spirale des victoires. Je me suis retrouvée dans plusieurs situations difficiles ces derniers temps et j’ai réussi à gagner. Cela m’a redonné confiance. »

Entraîneurs essorés

En fermant les yeux, on croirait entendre Theresa May. Même intonation, même grain de voix. Mais, contrairement à la première ministre britannique, la joueuse traverse un printemps sans turbulences. Elle qui n’avait jamais remporté quatre matchs de suite depuis le tournoi de Nottingham 2018 s’est qualifiée pour la finale du tournoi de Rabat début mai. A Rome, lors de la répétition générale avant le rendez-vous parisien, la Britannique a à nouveau atteint la finale, sortant coup sur coup Sloane Stephens, l’Américaine Venus Williams, la Tchèque Marketa Vondrousova (qu’elle retrouvera en demi-finale jeudi 6 juin) et Kiki Bertens (vainqueure à Madrid) pour atteindre à nouveau la finale.

En quelques semaines, Johanna Konta est ainsi revenue à son meilleur niveau, elle qui s’est déjà hissée en demi-finale de deux autres Grands Chelems : à l’Open d’Australie en 2016, puis à Wimbledon en 2017. Depuis, la Britannique s’était un peu perdue, dégringolant de la 4e place en juillet 2017 à la 50e un an plus tard. Une période où elle a essoré ses entraîneurs les uns après les autres : en deux ans et demi, Konta s’est séparée de trois d’entre eux. Mais ça n’a pas eu l’air d’effrayer le Français Dimitri Zavialoff – qui s’est par le passé occupé du Suisse Stan Wawrinka – quand il a été contacté par la Britannique à l’automne dernier.

Quand ils ont commencé leur collaboration, la joueuse était réputée pour ne pas avoir de plan B dès que le scénario du match ne se déroulait pas comme prévu : il s’est donc efforcé de corriger le tir, introduisant dans son jeu plus de variété. Cette semaine, elle a montré qu’elle avait appris à moduler son lift de fond de court et qu’elle savait désormais glisser les amorties les plus subtiles, ne se contentant plus de frapper fort et vite.

Première Britannique en demi-finales depuis 1983

Elle loue la façon qu’a son coach de ne pas la brider : « Il me donne la liberté de jouer comme j’ai envie de jouer, sans placer trop de contraintes ou de restrictions sur mes épaules, développait-elle mardi après sa victoire face à Stephens. J’apprécie ce processus d’autonomie pour que je sois la joueuse que je veux et que je fasse confiance aux décisions que je prends. »

Zavialoff n’est pas du genre à faire son apparition sur le court à la demande de sa joueuse, comme les tournois du circuit féminin le permettent (la règle n’est pas autorisée en Grand Chelem), comme il l’expliquait au Times, mardi 4 juin : « J’aime montrer aux joueurs que j’ai confiance en leurs décisions, peu importe si ce sont les bonnes ou pas, je suis derrière eux. Et je pense que le fait que la décision vienne d’eux-mêmes s’avère bien plus efficace que lorsqu’ils exécutent la consigne de quelqu’un d’autre. »

Née en Australie de parents hongrois, Konta est arrivée en Angleterre en 2005, alors âgée de 14 ans. La famille se fixe à Eastbourne, une station balnéaire du sud de l’Angleterre, connue des amateurs de tennis pour son tournoi sur gazon. Ce n’est que sept ans plus tard, en 2012, qu’elle obtient la nationalité britannique et décide de défendre les couleurs du pays. La petite Johanna envisageait d’abord une carrière en natation, mais des infections aux oreilles à répétition ont eu raison de ses ambitions. Elle s’est ensuite tournée vers l’athlétisme et le demi-fond, avant de choisir le tennis.

A Roland-Garros, la joueuse de 28 ans remonte le temps : elle est devenue la première Britannique à rallier les demi-finales de Roland Garros depuis Jo Durie en 1983, qui n’avait pas réussi à aller plus loin. Pour ce qui est de la dernière victoire d’une Britannique en simple dames, il faut remonter à 1976, l’année du sacre de Sue Barker.