Devant le domicile de Walter Lübcke, le 3 juin, près de Kassel (Hesse). / RALPH ORLOWSKI / REUTERS

Qui a tué Walter Lübcke, le préfet de Kassel (Hesse), retrouvé sur la terrasse de sa maison, une balle dans la tête, dans la nuit du samedi 1er au dimanche 2 juin ? Si les enquêteurs n’ont pas la réponse, son assassinat est en tout cas venu rappeler la haine que vouait l’extrême droite à ce chrétien-démocrate de 65 ans depuis le soutien qu’il avait accordé à la politique d’accueil de la chancelière Angela Merkel lors de la crise des réfugiés, en 2015.

Mardi, deux jours après la découverte du corps, l’adjoint de Walter Lübcke a rappelé que ce dernier recevait régulièrement des menaces de la part de groupes d’extrême droite, notamment les Reichsbürger (« citoyens du Reich »), une organisation de nostalgiques du IIIReich qui ne reconnaissent pas l’existence de la République fédérale d’Allemagne au point de ne pas payer leurs impôts et de fabriquer leurs propres papiers d’identité.

Après la mort de Walter Lübcke, plusieurs commentaires haineux ont circulé sur les réseaux sociaux, produits par des comptes identifiés comme proches de l’extrême droite. Exemple : « Le fils de pute a eu le coup de grâce. Respect ! » Ou encore : « Coupable, pas de pitié, voilà ce qui arrivera à Merkel et aux autres. »

Corps déplacé par un ambulancier

Membre de l’Union chrétienne-démocrate (CDU) depuis le milieu des années 1980, député régional de 1999 à 2009, Walter Lübcke avait été nommé, en 2009, préfet (Regierungspräsident) du district de Kassel, ville universitaire de 200 000 habitants située entre Francfort et Hanovre, par le ministre de l’intérieur de la Hesse, Volker Bouffier (CDU). Devenu depuis ministre-président du Land, M. Bouffier a rendu hommage, dimanche matin, à un « compagnon de longue date ».

En octobre 2015, un mois et demi après la décision prise par Mme Merkel de ne pas fermer les frontières de l’Allemagne aux réfugiés fuyant les guerres du Moyen-Orient pour rejoindre l’Europe de l’Ouest en prenant la route des Balkans, Walter Lübcke avait clairement pris position pour leur accueil, au nom des valeurs chrétiennes. « Ceux qui ne partagent pas ces valeurs peuvent quitter à tout moment ce pays », avait-il déclaré après avoir reçu des menaces de mort à l’occasion d’un débat citoyen. A cette époque, il avait été insulté par des membres du mouvement anti-islam et antimigrants Pegida, fondé fin 2014 à Dresde (Saxe).

L’enquête pourrait être compliquée par le fait que le corps de la victime aurait été déplacé par un ambulancier arrivé sur place avant l’arrivée de la police, ont révélé mardi soir Bild et le Spiegel. Interrogés sur ces révélations, les enquêteurs ont toutefois refusé de parler d’une « manipulation ». Walter Lübcke avait été retrouvé mort vers 0 h 35, dans la nuit de samedi à dimanche, sur la terrasse de sa maison de Wolfhagen-Istha, près de Kassel, par un proche. Il avait ensuite été transporté à l’hôpital, où sa mort avait été constatée après que toutes les tentatives de réanimation eurent échoué.