Theresa May, en juillet 2016 à Londres. / Neil Hall / REUTERS

Une première ministre toujours en poste, mais sans aucun poids politique : en démissionnant de la direction du parti conservateur, vendredi 7 juin, Theresa May s’est conformée à la règle en vigueur au Royaume-Uni selon laquelle seul le chef de la majorité parlementaire peut être nommé à la tête du gouvernement. Jusqu’à la désignation de son successeur, attendue avant la fin du mois de juillet, la députée de la circonscription de Maidenhead reste donc à son poste pour gérer les affaires courantes, mais sans pouvoir mener de dossiers d’importance ni faire progresser les négociations sur le Brexit.

Dès lundi, les négociations entre les députés conservateurs, les tories, vont donc débuter au Parlement pour dégager deux finalistes dans la course vers le 10, Downing Street, parmi les onze candidats pour l’instant déclarés. Un scrutin mené auprès des 160 000 adhérents du Parti conservateur permettra ensuite de désigner le futur premier ministre, qui devra « vendre un programme adapté à un petit échantillon de la population [les militants conservateurs] puis l’imposer à tout le monde [en tant que chef du gouvernement] », souligne le quotidien The Guardian dans son éditorial du 5 juin.

  • Les députés conservateurs sélectionnent deux candidats

Comme en 2016 au moment de la démission du précédent premier ministre, David Cameron, le successeur de Theresa May doit être nommé par une « procédure accélérée » : les 330 députés conservateurs ont quinze jours, à partir du 9 juin, pour soumettre deux noms au vote de leurs adhérents, qui auront au maximum quatre semaines pour choisir leur nouveau dirigeant.

Au sein du Parlement, c’est traditionnellement le « comité de 1922 » qui est chargé de l’organisation des élections pour le Parti conservateur. Ce groupe parlementaire, qui a pris de l’importance à partir de 1940, est constitué de tous les « backbenchers » (à l’« arrière-ban ») du mouvement, ces députés qui ne sont ni ministres ni membres de la direction du parti (eux sont appelés les « frontbenchers », littéralement « ceux des bancs du devant » dans l’enceinte du Parlement).

Chaque candidat doit être soutenu par au minimum huit députés de son groupe pour participer au scrutin. A l’issue d’une série de votes, les prétendants n’ayant pas récolté un certain nombre de voix (16 soutiens au premier tour, 32 au second, selon les prévisions de l’Institute for Government) sont éliminés. Les deux derniers restant peuvent participer à un second vote, ouvert à tous les adhérents du parti.

  • Les adhérents du parti conservateur désignent le futur premier ministre

Si les parlementaires conservateurs respectent leur calendrier, la campagne des deux candidats sélectionnés devrait débuter autour du 24 juin. Selon plusieurs sondages, l’ancien secrétaire d’Etat au Brexit Boris Johnson, partisan d’un « no deal » avec l’Union européenne, devrait sans problème être qualifié pour le duel de la nomination. L’actuel secrétaire à l’environnement de Theresa May, Michael Gove, et le ministre des affaires étrangères, Jeremy Hunt, se positionnent en seconde et troisième positions des intentions de votes.

Les deux nommés auront trois semaines pour séduire les 160 000 adhérents tories et accéder au poste de premier ministre, et le résultat devrait être connu autour du 21 juillet. La procédure de nomination est accélérée à cause de deux échéances importantes avant la fin de l’année : le Congrès annuel des tories au mois de septembre, qui pousse le parti à se présenter uni face à ses électeurs, et la prochaine échéance du Brexit, fixée au 31 octobre 2019.

Le premier ministre nommé pourrait cependant faire face, dès son arrivée au pouvoir, à une demande de vote de confiance de la part des députés d’opposition, désireux de tester au plus tôt à quel point le camp conservateur soutient le nouveau résident du 10 Downing street, explique Rowena Mason, éditorialiste politique du Guardian, dans un article du 6 juin. En cas d’échec – hypothèse peu probable – le nouveau chef du parti devrait envisager l’organisation de nouvelles élections législatives, risquant ainsi de perdre son mandat.

« Lost in Brexit » : le schéma pour tout comprendre à six mois de couacs entre Londres et Bruxelles

Il y a un peu plus de six mois, le 13 novembre 2018, Londres et Bruxelles s’entendaient sur un accord de sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE), après quarante-six ans de cohabitation. La date prévue pour cette sortie était le 29 mars, mais devant l’incapacité des parlementaires d’outre-Manche à se mettre d’accord avec leur gouvernement, un premier report a été négocié jusqu’à la fin du mois de mai. L’Union européenne a ensuite accepté un nouveau report, cette fois jusqu’au 31 octobre au plus tard. La première ministre britannique, Theresa May, a, de son côté, annoncé le 24 mai sa démission, qui sera effective le 7 juin.

Six mois de tergiversations donc, essentiellement côté britannique, et d’allers-retours entre Theresa May, sa majorité conservatrice, l’opinion publique et même l’opposition travailliste… Pour vous y retrouver, nous avons « résumé » les étapes de tous les rebondissements depuis la finalisation de l’accord.