Chronique. Quelques jours après le début de cette Coupe du monde féminine, nous pouvons d’ores et déjà relever le bon niveau des premiers matchs. Des joueuses techniques, du rythme, et en tant qu’ancienne attaquante, portée sur le jeu offensif, je suis satisfaite de voir que les équipes vont vite vers l’avant et attaquent en nombre. Il n’y en a pas beaucoup qui restent dans leur camp.

L’Angleterre, par exemple, a développé dimanche face à l’Ecosse un football équilibré : les Anglaises jouent bien au ballon, tout en n’hésitant pas à se projeter rapidement vers l’avant et à profiter des espaces. J’aime ce mélange entre possession et jeu plus direct. Autre point, je remarque qu’il est désormais plus compliqué de marquer. Chaque équipe est mieux préparée tactiquement. Il y a dix ou quinze ans, les matchs n’étaient pas diffusés tout au long de l’année, c’était dur d’étudier l’adversaire en vidéo avant les grands tournois. L’autre grand changement dans le jeu, c’est la justesse technique.

Pendant longtemps, les équipes qui gagnaient des titres étaient celles qui étaient le mieux préparées physiquement. Par exemple les Etats-Unis, triples championnes du monde, ou l’Allemagne, double championne du monde. A l’époque, ces deux nations couraient beaucoup, la technique n’était pas la priorité. Quand tu jouais face aux Allemandes, tu savais qu’il ne fallait pas toucher trop le ballon et, au contraire, jouer vite pour éviter leur pressing.

Culture de la gagne

La principale force de ces équipes résidait dans leur grande aptitude physique, non seulement dans l’impact mais aussi au niveau du cardio, de leur capacité à répéter des efforts du premier au septième match. Avec la Suède, c’était l’une de nos qualités. Même si l’on ne se sentait pas bien une semaine avant le tournoi, on savait que la préparation physique visait une forme optimale pour les matchs à élimination directe. A partir des huitièmes de finale, les différences se faisaient surtout là-dessus. Lors de la petite finale en 2011, que nous, les Suédoises, avons gagnée face aux Bleues, mes coéquipières de l’Olympique lyonnais m’avaient dit au retour qu’elles s’étaient senties fatiguées. Je pense que désormais la France a corrigé ça.

En 2011, la victoire du Japon a aussi démontré qu’un autre style de jeu était possible. On a compris qu’il était devenu nécessaire de bien jouer. Le niveau technique s’est amélioré partout, les Etats-Unis aussi ont compris que leur domination athlétique ne suffirait plus. Même si pour jouer comme les Japonaises, c’est-à-dire avec beaucoup de passes et de mouvements, il faut évidemment être affûtées physiquement.

La dernière pièce du puzzle est dans la tête, c’est la force mentale. C’est un point d’interrogation concernant les Françaises. Pour moi, les Bleues auraient déjà dû gagner un titre, ou au moins monter sur un podium. Les Etats-Unis ou l’Allemagne savent gagner. Les Américaines peuvent être menées 2-0 et ne jamais douter du fait qu’elles vont quand même s’imposer. Cette culture de la gagne ressemble à ce que nous avons créé à l’OL. Quand je regarde le onze français, je vois que huit joueuses ont joué là-bas avec moi. J’espère que ça va se vérifier sur le terrain cette année car à part cette incertitude, les Françaises ont tout pour elles.

Lotta Schelin

Lotta Schelin est l’ancienne attaquante de la Suède et de l’OL. Aujourd’hui consultante pour la télévision suédoise, elle analyse pour « Le Monde » la Coupe du monde.

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