Le bac au lycée Pasteur, à Strasbourg / FREDERICK FLORIN / AFP

Si Molière, Beaumarchais, Hugo sont à nouveau les invités des épreuves de français du baccalauréat, d’autres ont fait leur apparition, comme Andrée Chedid.

Avec ces auteurs, les lycéens ont travaillé, lundi 17 juin, sur l’identification de l’homme, la symbolique de l’arbre, le rapport à la terre mère.

Lors d’un tchat, Denise Maréchal, professeure de français à Quimper, a répondu aux questions des internautes et donné des clés pour la réalisation d’une belle copie.

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Zola, Flaubert, Aragon, Molière… Les femmes encore absentes des épreuves du baccalauréat ? Faut-il un quota d’autrices lors des examens de littérature ?

Denise Maréchal : Dans le corpus ES et S, sur quatre auteurs, deux sont des femmes. Parité respectée. Le commentaire porte sur le texte d’Andrée Chedid. Au-delà de la parité, il importe de s’attacher aux textes, à leur valeur littéraire et, surtout, aux exercices demandés en lien avec ces textes.

Pour cette dernière édition du bac avant la réforme Blanquer, les sujets sont-ils de qualité ?

Le sujet des L est le plus surprenant, car l’unité du corpus n’apparaît pas à première vue de manière évidente. La chanson est le point commun du regroupement et fait logiquement l’objet de la question de corpus. Mais, au-delà de cette question-prétexte, peu d’unité. Le commentaire du texte de Beaumarchais soulève le problème de l’analyse des chansons que contient le texte. Quelle place leur donner ? Comment les citer ?

La dissertation fait appel à des connaissances personnelles, notamment de représentations précises que les candidats pourraient mentionner. Ceci étant, on attend des élèves de série littéraire qu’ils aient un minimum fréquenté les théâtres ou visionné des mises en scène. Quant à l’écriture d’invention, il est toujours difficile d’imiter le style d’un auteur et d’écrire une suite ou une autre scène. Tout en respectant, ici, les codes de l’écriture théâtrale.

Le sujet des séries ES et S peut sembler banal à première lecture : des poèmes évoquant la nature, une dominante lyrique et une question de corpus très vague. Mais, en y regardant de plus près, les trois textes les plus récents entrent en résonance et en décalage avec le romantique Lamartine. Ils évoquent un rapport nouveau à la nature, l’identification de l’homme, la symbolique de l’arbre, le rapport à la terre mère… Un écho, en somme, aux questions de société que soulève actuellement le retour aux sources mêmes de la nature par les préoccupations écologiques.

Le texte à commenter est riche de pistes d’analyse, la dissertation ouvre également différents sentiers d’exploration de l’écriture poétique intéressants. Le sujet d’invention est plus épineux, car la question de l’évaluation de la qualité d’un texte poétique pose toujours problème et renvoie à une certaine subjectivité du correcteur.

Le sujet des S et ES me semble un peu difficile. Il y a quatre textes de poésie, dont deux contemporains, un texte à commenter court et abstrait… Ça sent le sujet casse-gueule. Qu’en pensez-vous ?

Le sujet S et ES traite d’un topo littéraire, mais à travers un prisme original. Là où on aurait pu attendre un corpus sur la nature comme expression des émotions de l’homme, les poèmes renouvellent ces thèmes en le revivifiant de nos problématiques contemporaines : la terre comme source de vie, l’évocation des sens, l’arbre comme symbole de l’humanité… Le texte d’Andrée Chedid est riche de suggestions à exploiter.

Est-ce logique d’avoir un sujet sur la poésie pour les séries S et un sujet beaucoup plus facile d’accès pour les séries L ?

Le sujet des L n’est pas plus « facile » que celui des S et ES. Il ne suffit pas de limiter notre regard à l’accès plus ou moins facile au style d’un auteur ou à la lisibilité du texte pour un lecteur contemporain. La difficulté du travail réside dans l’exercice demandé à partir de ce corpus de textes. Or, la question posée aux L demande davantage de finesse d’analyse que celle posée aux ES et S, qui est plutôt vaste et rend le champ des éléments de réponses possibles plus large. De même, la dissertation des L fait appel à des connaissances plus précises et à une culture littéraire et artistique plus pointue.

Ne trouvez-vous pas dommage que le sujet des L ne présente aucun texte de théâtre contemporain et que le sujet de dissert de cette même filière soit fermé à tous ceux qui n’ont pas la chance ou l’opportunité d’aller au théâtre ?

En effet, il peut être déploré qu’aucun texte contemporain ne participe au corpus des L, mais il semble que la volonté des rédacteurs ait été de proposer un ensemble cohérent. L’évolution du théâtre au XXsiècle et la remise en cause des codes auraient sans doute été difficiles à faire coïncider avec la question de corpus, qui porte essentiellement sur un aspect très limité.

Concernant la dissertation, en effet, les élèves ayant pu se rendre au théâtre sont sans doute favorisés quant aux connaissances qu’ils ont engrangées, mais encore faut-il qu’ils puissent les exploiter à bon escient dans leur devoir et analyser correctement les mises en scène. En revanche, tous les élèves ont visionné des captations de pièces en classe et peuvent également en exploiter les ressources. Le travail fait en classe reste primordial.

Les élèves ont-ils déjà lu ces textes au lycée ou faut-il les lire et les analyser sans préparation ?

Les élèves ne connaissent pas nécessairement les auteurs et la connaissance de leurs œuvres n’est pas un prérequis, même si elle peut aider. Il y a fort à parier que les L ont cependant déjà planché sur des textes de Molière, Beaumarchais ou Hugo et que leurs théories dramatiques ne leur sont pas inconnues. Pour les ES et S, le choix plus moderne des auteurs semble aller dans le sens d’une découverte au fil des mots.

Demander à des lycéens – notamment des profils scientifiques – d’écrire « un texte poétique d’une certaine ampleur », n’est-ce pas totalement hors de propos pour 95 % d’entre eux ?

Le choix du sujet d’invention en ES et S correspond plus à ce qu’on attendrait en L : faire preuve d’imagination, maîtriser les images, éventuellement la versification. Cependant, il ne s’agit pas de compétences réservées aux littéraires et il peut être intéressant de donner un espace de liberté à l’expression personnelle et lyrique aussi aux autres lycéens. De plus, l’écriture d’invention disparaissant l’an prochain, la liberté offerte et la forme très littéraire du sujet poétique semblent une ultime possibilité donnée à l’élève de démontrer ses compétences d’écriture, et pas seulement sa maîtrise des méthodes d’analyse des textes.

Pour le sujet S et ES, de quoi l’arbre est-il le symbole ?

Il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’un poème et que les différentes connotations sont juste suggérées sans qu’il s’agisse d’une seule et unique interprétation. L’arbre peut représenter l’homme avec et sans majuscule. Il suit le parcours d’un être qui « s’affranchit » avant « d’embrasser l’espace », un parcours qui est également celui de l’humanité. L’arbre de la ville, déraciné de sa campagne d’origine, symbolise également la solitude de l’être. Il incarne tout de même une renaissance, un espoir auquel s’accrocher, « la montée des sèves/la pression des bourgeons ».

Que pensez-vous du choix de l’invention ? En particulier pour la série technologique, est-ce risqué ?

Le choix du travail d’écriture est toujours délicat et dépend du sujet et des compétences du candidat. En ce qui concerne l’invention, il vaut mieux disposer d’un vocabulaire riche et bien maîtrisé, d’une syntaxe correcte et d’un « style » qui permette de faire la différence. Ceci étant, il faut surtout saisir d’emblée les attentes du sujet. En l’occurrence, cette année, en L, bien capter les caractéristiques du style de Molière et les registres dominants. Gare aux anachronismes et autres erreurs de vocabulaire. Attention, aussi, à ne pas oublier les didascalies.

Pour la série techno, le sujet d’invention est souvent massivement choisi par les élèves. Il est sans surprise cette année. Une description de ville faisant la part belle aux sensations. Pas de piège pour celui ou celle qui maîtrise un minimum l’expression des ressentis.

A quoi ressemblera l’épreuve de français, lors de la prochaine édition du baccalauréat, après la réforme Blanquer ?

Gros changements en perspective pour le bac de français, dont les épreuves n’avaient pas été modifiées depuis des dizaines d’années. En série générale, à l’écrit, disparition du corpus et de l’écriture d’invention. L’épreuve de quatre heures portera sur un commentaire ou une dissertation, au choix. Le commentaire, à partir d’un texte n’appartenant pas aux œuvres au programme, la dissertation, au contraire, portant sur une œuvre au programme. Programme, je le rappelle, national.

En série techno, au choix : commentaire ou contraction de texte suivi d’un essai (écrit argumentatif sur un sujet de société). A l’oral, pour tout le monde, commentaire linéaire d’un texte (préparé en cours), puis discussion autour d’une œuvre choisie par l’élève.

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Tchat « philo », avec Thomas Schauder, lundi 17 juin à partir de 9 h 15.

Compte rendu ici

Tchat « français », lundi 17 juin à partir de 17 heures.

Tchat « histoire-géo », mardi 18 juin à partir de 11 h 30 (sujets dès 9 h 15)

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