Dacian Ciolos, alors premier ministre roumain, en 2016 à Bruxelles. / THIERRY CHARLIER / AFP

Sa désignation ne faisait guère de doute, mais ses partisans restaient quand même sur leurs gardes. Le Roumain Dacian Ciolos a été élu président du groupe des libéraux au Parlement européen, mercredi 19 juin, avec environ 60 % des suffrages de la centaine d’élus composant la troisième formation politique de l’hémicycle. La Néerlandaise Sophie in ’t Veld, vétéran du groupe, qui défendait une ligne plus « nordique » et davantage d’ouverture sur les plans économiques et sociétaux que l’ex-premier ministre roumain (entre 2015 et 2017), n’a obtenu que 40 % des voix.

Pascal Canfin, numéro 2 de la liste Renaissance, s’est empressé de féliciter M. Ciolos : « C’est le premier président issu d’Europe centrale d’un groupe majeur au Parlement européen. Excellente nouvelle ! ». L’ex-commissaire à l’agriculture de la Commission Barroso 2 (2010-2014), souvent qualifié d’« Emmanuel Macron roumain », dispose d’un CV et d’une réputation enviables. Très proche de Michel Barnier, négociateur en chef de l’Union européenne pour le Brexit, il est agronome de formation et a fait une partie de ses études en France – il est parfaitement francophone. Ex-allié des conservateurs européens, il s’est récemment rapproché du centre.

Il n’empêche, il ne doit son poste qu’au magistral faux pas de Nathalie Loiseau, mi-juin. Forte du soutien de vingt autres élus français – de loin la plus forte délégation du groupe libéral au Parlement (ADLE, rebaptisé Renew Europe, ou « Renaissance Europe ») –, la tête de la liste aurait pu très logiquement en revendiquer la présidence. Mais les propos à l’emporte-pièce de l’ex-ministre des affaires européennes, y compris contre son propre camp, ont disqualifié sa candidature, ouvrant la voie à M. Ciolos. Si ce dernier peut être lui aussi considéré comme le « candidat de Paris », la séquence n’en est pas moins dommageable pour l’influence française dans une institution jusqu’alors largement dominée par les Allemands.

Un Français obtient une des vice-présidences

La France a quand même récupéré une des vice-présidences du groupe. Elle revient à Dominique Riquet, ex-maire de Valenciennes. Ce spécialiste du transport est l’un des rares élus de la liste Renaissance à bien connaître le Parlement européen, où il a déjà effectué deux mandats. « Nous avons finalement réussi à atterrir, avec un président de groupe soutenu par la France, estime Pieyre-Alexandre Anglade, député des Français du Benelux. C’est quand même bien pour Emmanuel Macron, il dispose maintenant d’un groupe fort au Parlement européen sur lequel il pourra s’appuyer. Cela va lui redonner la force qui avait été la sienne au lendemain des élections européennes. »

Guy Verhofstadt, qui fut président de l’ADLE pendant dix ans, va donc céder sa place. Pour mieux rebondir à la présidence du Parlement européen ? Son ambition est un secret de Polichinelle à Strasbourg, mais ce poste fait partie d’un « paquet de nominations » sur lequel les dirigeants de l’Union veulent garder la haute main. « Il ne faut pas sous estimer M. Verhofstadt », glisse une source parlementaire. « C’est quand même un de ceux qui se sont le plus battus pour défendre l’Union pendant la crise, avec Daniel Cohn-Bendit et Martin Schulz [ex-président du Parlement européen] », rappelle M. Anglade.

La présidence de Renew Europe est « une étape importante mais ne constitue que le début de notre projet », a réagi M. Ciolos mercredi matin. Ses adversaires avaient laissé entendre, ces derniers jours, qu’il ne resterait pas à son poste très longtemps, ayant l’ambition de retourner en Roumanie pour tenter sa chance lors de l’élection présidentielle prévue fin 2019. « Il a été clair, il n’en est pas question, il est ici pour rester, pour s’investir dans le groupe et contribuer à sa cohésion », assure t-on dans son entourage.