Des migrants à Grande-Synthe attendent de pouvoir gagner l’Angleterre. / PHILIPPE HUGUEN / AFP

Le préfet a huit jours pour s’exécuter. Le Conseil d’Etat a enjoint, vendredi 21 juin, à la préfecture du Nord d’installer des points d’eau, douches et sanitaires « en nombre suffisant » à proximité d’un gymnase de Grande-Synthe, autour duquel vivent quelque 700 migrants. Des maraudes pour les informer de leurs droits devront également être organisées.

La plus haute juridiction administrative a également exigé du préfet de « mettre en place des maraudes d’information (…) à l’occasion desquelles des documents dans les langues principales, dont le Sorani, seront remis aux migrants pour les informer de leurs droits », peut-on lire dans son ordonnance.

Saisi en référé par neuf associations rejointes par la commune de Grande-Synthe qui voyaient dans les « conditions de vie » de ces migrants et « l’inaction » de l’Etat une « violation de leurs droits fondamentaux », le Conseil d’Etat annule ainsi une décision du tribunal administratif de Lille, datée du 9 mai.

« C’est une véritable victoire »

« Depuis plus de dix ans, de très nombreux migrants », souhaitant rejoindre l’Angleterre, « sont présents sur le territoire de la commune de Grande-Synthe » et dans le bois du Puythouck, rappelle le Conseil d’Etat dans cette ordonnance. « En décembre 2018, la commune (…) a décidé, contre l’avis de l’Etat », d’ouvrir un gymnase pour les accueillir, ainsi qu’un autre local, finalement, fermé en mai. « Il appartient (…) aux autorités titulaires du pouvoir de police générale » de veiller « à ce que le droit de toute personne à ne pas être soumise à des traitements inhumains ou dégradants soit garanti », argue encore ce dernier.

Par ailleurs, les maraudes organisées dans le bois de Puythouck « ne portent que marginalement sur le gymnase » et « une telle situation est constitutive d’une carence » dans les missions de l’Etat, considèrent les juges.

« C’est une véritable victoire. (…) Le Conseil d’Etat reconnaît que l’Etat a failli à sa mission de protection. La commune de Grande-Synthe a dû pallier sa carence », a réagi dans un communiqué l’avocat de la commune, Patrice Spinosi. La mairie engagera également, « dans les semaines à venir, une action indemnitaire contre l’Etat pour le contraindre à participer aux importantes dépenses » engagées en vue de « l’accueil décent » des migrants, a-t-il annoncé.

« Le préfet du Nord prend acte » de cette décision, a-t-il fait savoir dans un communiqué, notant, toutefois, que l’ordonnance « écarte de nombreux points » soulevés par les requérants, rejetant, par exemple, leur demande de « suspension des expulsions » ou l’injonction de mettre en place à Grande-Synthe des structures d’hébergement d’urgence. Le Conseil d’Etat « donne acte à l’Etat de la bonne gestion des opérations de mise à l’abri sur la commune et notamment de la régularité de la mise en œuvre du concours de la force publique lors des opérations d’expulsion », estime le préfet.