Arte, à la demande, documentaire

Un demi-siècle après leurs premiers concerts, ils sont toujours là. Mais au-delà de cette longévité musicale, le plus remarquable est de constater que, depuis 1969, Billy F. Gibbons, Dusty Hill et Frank Beard jouent ensemble avec un plaisir qui, si l’on en juge par les témoignages recueillis dans ce documentaire jouissif, n’est pas prêt de s’éteindre. Au-delà de barbes devenues mondialement célèbres, de tubes qui le sont tout autant et de vidéoclips mémorables, ZZ Top fait partie du patrimoine. Grâce à un son immédiatement identifiable, une rythmique entêtante, un mélange bien dosé de blues et de rock. Le tout joué par trois hurluberlus qui revendiquent depuis toujours leur héritage texan avec fierté, humour et tendresse.

Sam Dunn, musicien, anthropologue et réalisateur canadien dont on avait remarqué la qualité du travail sur Iron Maiden et Alice Cooper parvient, dans cette plongée au cœur du phénomène ZZ Top, à faire d’un demi-siècle de carrière une histoire musicale de l’Amérique. La qualité des témoignages (musiciens, producteurs), la profusion d’archives filmées, notamment de concerts datant des années 1970 et même l’apparition de quelques scènes animées font de ce documentaire un délice à déguster sans tremper sa barbe dans sa Bud (weiser).

Succès colossal

C’est à Houston (Texas) que les trois musiciens, cheveux longs mais moins barbus, se rencontrent après diverses expériences de groupes aux succès aléatoires. En 1969, Shuffle in C, blues instrumental, marque la véritable naissance du trio qui a failli s’appeler ZZ King. Mais ça sonnait moins bien. Epaté, Bill Ham, producteur et manageur de qualité, leur lance : « Je ferai de vous des stars ! » La suite ? Des anecdotes par dizaines, dont celle de ce mythique concert à Alvin, au fin fond du Texas, devant… un spectateur ! Ou ces trois concerts mémorables donnés à Honolulu, en première partie des Rolling Stones. Ou encore cette tournée démente intitulée Texas Tour, au cours de laquelle le trio était accompagné de quelques bêtes locales : bison, vache aux longues cornes, serpents, rapaces.

ZZ Top introduit de l’énergie punk dans son jeu, s’amuse avec des synthétiseurs, tente la distorsion des guitares et des voix

Le succès colossal de cette tournée marque un tournant. « On n’avait pas arrêté de bosser depuis 1969. Nous avions tous besoin de nous reposer, de prendre du recul », souligne Billy F. Gibbons. La pause, profitable à tous, devait durer trois mois, elle va s’éterniser deux ans. Frank, accro à la drogue, part en cure de désintoxication. Billy découvre le punk en Angleterre et d’étranges croyances en Inde. « Le succès est un truc formidable, mais il peut aussi te foutre en l’air », résume Dusty Hill. Il ne détruira pas le trio qui retrouve l’énergie et la joie de jouer ensemble après ce long break. Détail capillaire qui a son importance : Billy et Dusty ne se sont pas rasés durant cette pause. Leurs longues barbes vont devenir mythiques.

Toujours prêt à de nouvelles expériences musicales, ZZ Top introduit de l’énergie punk dans son jeu, s’amuse avec des synthétiseurs, tente la distorsion des guitares et des voix. Parallèlement, la diffusion de clips vidéo sur MTV avec voitures futuristes, filles de rêve et scénario signé Tim Newman font découvrir le groupe à un public encore plus large. Le petit groupe texan des années 1970 est devenu phénomène mondial.

ZZ Top, That little Ol’Band from Texas, de Sam Dunn (Royaume-Uni, 2019, 90 min). www.arte.tv/fr/videos/086905-000-A/zz-top-that-little-ol-band-from-texas/