Le premier jardin du projet urbain « Parques del rio », à Medellin (Colombie), a été inauguré en 2016. / Andres Carmona Arango pour « Le Monde »

Un milliard de personnes habitaient dans des villes en 1960. Elles sont aujourd’hui plus de 4 milliards. Et les Nations unies annoncent que la population mondiale sera aux deux tiers urbaine en 2050. Cette croissance massive et continue pose, partout dans le monde, les mêmes défis.

Défis sociaux : si les grandes métropoles constituent des pôles de croissance et de développement, elles concentrent aussi des inégalités de plus en plus criantes, y compris dans les régions les plus riches du monde. Dans une étude retentissante publiée le 3 juin, l’Institut d’aménagement et d’urbanisme (IAU) a montré que la polarisation spatiale s’était fortement accrue entre 2001 et 2015 en Ile-de-France.

Non seulement les zones les plus paupérisées le sont toujours, mais les revenus en euros constants y ont diminué. Même phénomène, inversé, dans les zones les plus riches, avec, en toile de fond, l’imminent passage du prix moyen du mètre carré parisien au-dessus de la barre symbolique de 10 000 euros.

Paris n’est qu’un exemple parmi des dizaines dans les pays développés. Sans parler des villes qui encaissent des chocs migratoires structurels ou exceptionnels dans les pays les plus pauvres de la planète.

Défis environnementaux : 70 % des émissions de CO2 sont le fait des villes, et les prévisions à l’horizon 2050 affolent les thermomètres – des épisodes de 55 °C à l’ombre sont ­annoncés à Paris. Dans le monde entier, la guerre aux véhicules les plus polluants est ouverte, à grand renfort de péages urbains, de zones piétonnières, de forêts dans les villes, de « zones vertes », de réaménagements de la voirie pour libérer de l’espace aux modes de déplacement doux… Le secteur du bâtiment, l’un des principaux émetteurs de CO2 (36 % en Europe et 27 % en France), est également sur la sellette.

Collecte de données

Défis civiques : les progrès de la smart city, la ville connectée, ouvrent la perspective de ­services urbains optimisés par la collecte de données toujours plus riches, mais aussi la possibilité d’un contrôle accru des habitants et d’un recul de leur pouvoir de décision comme citoyens. Même Toronto (Canada), ­laboratoire mondial de la ville connectée ­depuis qu’a été confié à Sidewalk Labs, ­société sœur de Google, le soin de penser son futur, revient du fantasme de la ville pilotée par les données.

Ces enjeux seront au cœur de la conférence « Libertés, égalité, viabilité : la ville-monde face aux défis du siècle », qu’organise Le Monde - ­Cities, vendredi 28 juin. Ils irriguent aussi les innovations urbaines que nous récompensons pour la quatrième fois dans le cadre des prix de l’innovation urbaine Le Monde - Cities et que nous vous dévoilons dans ces pages.

Ils vous feront voyager des embouteillages parisiens dans lesquels se faufilent les vélos d’Olvo pour livrer des encombrants jusqu’aux friches de la tentaculaire Lima (Pérou), que les militants d’« Ocupa tu calle » invitent les habitants à reconquérir. En passant par un quartier populaire nantais qui verra, dans quelques mois, des serres surplomber ses immeubles. Par les plages de Dar es-Salaam (Tanzanie) où la start-up EcoAct collecte des monceaux de déchets plastiques pour les ­reconvertir en poutres de construction. Et par les rives d’une rivière cloaque qui traverse ­Medellin (Colombie) et que réinvente l’énorme projet « Parques del rio ».

Toutes ces initiatives – et leurs acteurs – prouvent que le combat n’est pas perdu d’avance et que, partout dans le monde, organisations et individus se mobilisent concrètement pour que la planète des villes reste vivable, dans tous les sens du terme.