A Villepinte, près de Paris, en juin 2018. / Benoit Tessier / REUTERS

C’est ce qu’on peut appeler le sens du timing. Alors que la série Chernobyl rencontre un succès du niveau de Game of Thrones, le conglomérat russe du nucléaire célèbre les 65 ans du nucléaire civil avec tambours et trompettes. Rosatom – souvent traduit par Corporation d’Etat de l’énergie atomique – fêtait, jeudi 27 et vendredi 28 juin, la mise en service du réacteur 1 de la centrale d’Obninsk, la toute première au monde à avoir été connectée à un réseau électrique. Située à une centaine de kilomètres au sud-ouest de Moscou, la centrale a été connectée au réseau le 26 juin 1954, à 17 h 45, et est restée en service jusqu’en 2002.

Le réacteur 1 d’Obninsk – construit en seulement trois ans – était d’une capacité installée très réduite, de 5 mégawatts (à comparer aux plus de 1 000 mégawatts de la plupart des réacteurs installés aujourd’hui dans le monde).

« La centrale numéro 1 est le point initial de développement de la filière industrielle de l’énergie nucléaire mondiale », se félicite Rosatom dans un communiqué. Le groupe russe a prévu plusieurs jours de festivités, sous le haut patronage de son PDG, Alexey Likhachev : une cérémonie est prévue à Moscou, puis une visite de la centrale, aujourd’hui devenue un musée, ainsi que des débats sur « l’impact environnemental des centrales nucléaires », des concerts et des cérémonies de remise de prix.

Une série accusée de faire le jeu de la propagande occidentale

Un programme de célébrations qui se garde bien de préciser que le réacteur d’Obninsk est un prototype des réacteurs RMBK, qui a ensuite servi de base à toute un pan de l’industrie nucléaire russe, et en particulier à la centrale de Tchernobyl. Le réacteur numéro 4 est entré en fusion le 26 avril 1986, provoquant la catastrophe nucléaire la plus grave du XXe siècle.

La série Chernobyl, produite par HBO et diffusée actuellement en France par OCS, raconte en cinq épisodes le début de la catastrophe et les difficultés des autorités soviétiques à y faire face. Une diffusion qui a suscité un débat en Russie, certains médias accusant la série de faire le jeu de la propagande occidentale contre Moscou, alors que le ministre russe de la culture a salué une œuvre « magistrale » et « assez proche de la réalité ».

Bien loin du dôme en béton qui recouvre aujourd’hui le réacteur numéro 4 de Tchernobyl, Rosatom – qui bénéficie d’un soutien financier et politique considérable de l’Etat russe – continue de vendre avec succès sa technologie dans le monde entier : l’entreprise a des contrats en cours dans une trentaine de pays, du Bélarus au Bangladesh, en passant par la Chine ou l’Egypte. Rosatom a également inauguré, fin avril, la première centrale nucléaire flottante, au large de Mourmansk, en Sibérie.