La tour Eiffel cernée par la pollution, le 9 décembre 2016. / GONZALO FUENTES / REUTERS

Le tribunal administratif de Paris a épinglé à son tour jeudi 4 juillet la « carence fautive » de l’Etat « pour réduire, le plus rapidement possible, les valeurs de dioxyde d’azote et de particules fines dans l’air », sans toutefois indemniser les plaignants pour le préjudice « qu’ils estimaient subir ».

C’est la deuxième fois qu’une décision de ce type mettant en cause l’Etat est rendue. A la fin de juin, le tribunal administratif de Montreuil avait estimé que l’Etat avait commis une faute, à la suite du recours d’une mère et de sa fille vivant près du périphérique et souffrant de problèmes respiratoires.

« Une bonne nouvelle qu’une deuxième juridiction retienne la faute de l’Etat »

« Le tribunal admet ainsi que l’Etat a commis une faute de nature à engager sa responsabilité. C’est une bonne nouvelle que la deuxième juridiction saisie retienne aussi la faute de l’Etat », a réagi jeudi Me François Lafforgue, qui défendait les trois plaignants souffrant de diverses pathologies respiratoires.

Ces trois personnes qui résident à Paris depuis plus de vingt ans avaient demandé au tribunal parisien de condamner l’Etat à les indemniser. Parmi elles, Clotilde Nonnez, Parisienne victime de problèmes respiratoires chroniques et figure de proue de ces requérants. Cette professeure de yoga d’une cinquantaine d’années avait été la première en France à attaquer l’Etat en justice en la matière, en juin 2017.

Elle avait réclamé 140 000 euros d’indemnisation, les deux autres plaignants avaient demandé de leur côté 83 000 et 120 000 euros, mais le tribunal administratif de Paris a décidé de ne pas les dédommager jugeant que le lien de causalité entre les pathologies respiratoires et l’insuffisance des mesures prises n’était pas avéré. « C’est une déception. Nous allons certainement faire appel de cette décision », a expliqué l’avocat des plaignants.

48 000 morts prématurées chaque année dues à la pollution aux particules fines

« On a toujours dit qu’il ne s’agissait pas d’ouvrir une boîte de Pandore mais que l’Etat prenne ses responsabilités et indemnise des victimes, quand des personnes sont vulnérables et ont subi de plein fouet les épisodes de pollution ou ont contracté des pathologies respiratoires », a par ailleurs déclaré Me Lafforgue. « Nous allons continuer à déposer des recours pour des victimes, des enfants malades, quand les dossiers sont étayés », dit-il, avec 39 recours déjà engagés ou sur le point de l’être au sein de son cabinet.

Selon l’agence Santé publique France, la pollution aux particules fines entraîne chaque année 48 000 morts prématurées dans le pays. Mesurée par des valeurs fixées par Bruxelles, l’exposition aux principaux polluants (particules fines, ozone, benzène, dioxyde d’azote et dioxyde de soufre) ne doit pas dépasser certains niveaux, sur un jour et sur l’ensemble de l’année. « L’Etat français est soumis à cette obligation de résultat transposée dans le code de l’environnement », souligne le tribunal.

Si la situation s’est globalement améliorée depuis quinze ans, ces normes sont régulièrement dépassées dans les grandes villes ou dans des bassins industriels. Une cinquantaine de recours ont été déposés par d’autres victimes de la pollution à  Paris, Lyon, Lille ou Grenoble (vallée de l’Arve), selon les associations.