Dans une usine du constructeur automobile Ford, à Chicago, dans l’Illinois, le 24 juin. / Kamil Krzaczynski / REUTERS

Les chiffres de l’emploi publiés vendredi 5 juillet aux Etats-Unis ont confirmé la bonne santé de l’économie du pays et écarté pour le moment les craintes d’un ralentissement américain dans un contexte de tensions commerciales au niveau mondial. Après un mois de mai décevant (72 000 emplois créés), le mois de juin relève la moyenne de l’année 2019 avec 224 000 nouveaux emplois. Il s’agit du 105e mois consécutif au cours duquel les employeurs du pays ont créé de l’emploi, une période record. « Incroyable », s’est félicité le président Donald Trump. Mais sur les six premiers mois de l’année, la moyenne reste inférieure aux performances de 2018 (172 000 contre 223 000).

Le secteur de la santé (+ 50 500 emplois) est celui qui a le plus recruté en juin, suivi de celui des transports et de la construction. Le secteur manufacturier, davantage soumis aux aléas des guerres commerciales entre les Etats-Unis et plusieurs de ses partenaires, a tout de même embauché 17 000 personnes, contre 3 000 les mois précédents. Le commerce de détail, en revanche, a supprimé des emplois.

Parallèlement, le taux de chômage, historiquement bas, a légèrement augmenté (3,7 %) en raison d’un plus grand nombre de personnes réintégrant le marché de l’emploi. La part des personnes en âge de travailler ou de chercher un emploi a atteint 62,9 % en juin. Avec un taux de chômage sous la barre des 4 % depuis un an, certains employeurs peinent à recruter. « Nous sommes dans un cycle de forte prospérité », a réagi Larry Kudlow, le conseiller économique du président américain, sur Fox Business.

Fin juillet, date de la prochaine réunion de la Fed

Aussi encourageants soient-ils pour l’économie, ces chiffres n’ont guère séduit les marchés boursiers. Aux Etats-Unis et en Europe, ils ont accusé une baisse après l’annonce des résultats de juin. Ces dernières semaines, une série d’indicateurs économiques moins favorables avaient laissé entrevoir aux investisseurs la possibilité d’une baisse des taux par la Réserve fédérale (Fed). Il n’en sera rien, au moins jusqu’à la fin juillet, date de la prochaine réunion de la banque centrale américaine et l’annonce de la première estimation de croissance pour le deuxième trimestre.

Mais au-delà de la tenue du marché de l’emploi américain, la Fed avait laissé entendre en juin qu’elle baisserait les taux d’intérêt si les tensions commerciales créées par les Etats-Unis s’aggravaient, si l’économie mondiale s’essoufflait davantage et si l’inflation demeurait sous les 2 %.

Aussi, si le président américain a toutes les raisons de se réjouir de la bonne santé du marché de l’emploi, un argument imparable dans sa campagne de réélection, il devrait fulminer une nouvelle fois contre la réticence de la Fed à baisser les taux. Donald Trump est convaincu que la croissance du pays pourrait atteindre « 4 % à 5 % » si les taux d’intérêt étaient plus bas et que « l’économie décollerait comme une fusée », ainsi qu’il l’a répété vendredi.

La croissance est principalement soutenue par la consommation des ménages

Pour l’heure, les projections de croissance pour 2019 s’établissent plutôt autour de 2 %, contre 2,9 % en 2018 : la Fed prévoit 2,1 % et le Fonds monétaire international (FMI) 1,9 %. Un ralentissement anticipé alors que les effets de la forte baisse des impôts de l’an dernier s’estompent. Et la croissance est principalement soutenue par la consommation des ménages, dont la confiance reste forte.

Néanmoins, un bémol est à apporter au niveau des salaires. S’ils ont bien augmenté de 3,1 % par rapport à l’an dernier, leur croissance était plus soutenue en début d’année, à 3,4 %. Une variation qui reste en tous les cas inférieure aux augmentations enregistrées lors du boom économique des années 1990. Un marché de l’emploi tendu laissait présager de plus fortes hausses. Aujourd’hui, la moitié des salariés américains touchent moins de 18,58 dollars de l’heure et un tiers moins de 15 dollars, des sommes qui rendent difficiles des économies ou des investissements.

Les effets positifs de la croissance économique actuelle toucheraient donc seulement deux tiers de la population, estime dans le Washington Post Matthew Mish, responsable de la politique des crédits à la banque UBS. « 60 % des Américains ont connu un gain financier, tandis que 40 % n’ont rien ressenti. » Ce dernier tiers a certes bénéficié de légères augmentations de salaires mais, dans le même temps, a dû faire face à des dépenses en hausse pour se loger, se soigner ou se former. Une population qui a du mal à réaliser au quotidien que l’économie américaine est entrée lundi 1er juillet dans la plus longue période d’expansion économique de son histoire récente.