Entre incidents maritimes et déclarations contradictoires alors que la crise se poursuit entre Washington et Téhéran et que la médiation tentée par la France n’a pas encore porté ses fruits, un nouvel épisode dans le golfe Persique fait craindre des risques d’escalade. Le gouvernement britannique a déclaré à l’aube que trois bateaux iraniens « ont tenté d’empêcher le passage d’un navire de commerce » britannique dans le golfe Persique, entraînant une réaction de la marine militaire du Royaume-Uni. Les gardiens de la révolution iraniens ont, de leur côté, nié avoir tenté de bloquer ce vaisseau, selon un communiqué de leur agence de presse, Sepah. « Il n’y a eu aucune confrontation avec des navires étrangers, y compris britanniques, au cours des dernières vingt-quatre heures », affirme le communiqué.

D’après Londres, l’incident survenu mercredi a poussé la marine britannique à déployer une frégate en soutien au navire de commerce, un pétrolier appartenant à BP Shipping, la filiale de transport du géant des hydrocarbures BP. « Le “HMS Montrose” a été contraint de se positionner entre les navires iraniens et le “British Heritage” et de lancer des avertissements verbaux aux navires iraniens, qui ont ensuite fait demi-tour », a indiqué un porte-parole du gouvernement britannique. « Nous sommes préoccupés par cette action et continuons à exhorter les autorités iraniennes à désamorcer la situation dans la région. » Un avion américain a filmé l’incident, qui s’est terminé lorsque la frégate britannique HMS Montrose, qui escortait le tanker, a pointé ses armes sur les bateaux iraniens en leur intimant de s’éloigner, selon CNN.

Succession d’incidents

L’épisode de mercredi intervient alors qu’une crise dans la crise iranienne se noue entre Londres et Téhéran. Il fait suite à l’arraisonnement, la semaine dernière, d’un pétrolier iranien, au large de Gibraltar, territoire dépendant de Londres, par le Royaume-Uni. Ce bâtiment de 330 mètres d’une capacité de deux millions de barils avait été arraisonné le 4 juillet par la police et les douanes de Gibraltar, assistées d’un détachement de Royal Marines. « Nous avons des raisons de croire que le “Grace 1” amenait sa cargaison de pétrole brut à la raffinerie de Banias en Syrie, propriété d’une entité sujette aux sanctions de l’UE contre la Syrie » et qu’il agissait « en violation » de ces sanctions, avait indiqué le chef du gouvernement de Gibraltar, Fabian Picardo.

Quelques heures avant l’incident de mercredi, Hassan Rohani avait averti le gouvernement britannique que cette décision, que l’Iran qualifie d’acte de piraterie, l’exposait à des mesures de rétorsion de la part de Téhéran. « Je le rappelle aux Britanniques : c’est vous qui êtes à l’initiative de l’insécurité », avait déclaré, mercredi, M. Rohani, lors d’un conseil des ministres. Outre le président iranien, Hassan Rohani, le ministre de la défense, Amir Hatami, a également affirmé lundi que l’arraisonnement du Grace 1 ne resterait pas « sans réponse ». Le 5 juillet, Mohsen Rezaï, ancien commandant en chef des gardiens de la révolution, l’armée idéologique de la République islamique, avait suggéré que l’Iran saisisse un pétrolier britannique en représailles.

Les tensions autour du détroit d’Ormuz, par lequel transite près d’un tiers du pétrole brut mondial acheminé par voie maritime, ont culminé au cours des dernières semaines avec une succession d’incidents, dont des attaques d’origine inconnue contre des pétroliers et la destruction d’un drone américain par l’Iran. Téhéran, accusé par Washington d’être à l’origine des sabotages de tankers, a démenti toute responsabilité.

Coalition maritime

Dans ce climat d’extrême tension, les Etats-Unis souhaitent former une coalition maritime internationale garantissant la liberté de navigation dans le golfe. « Je pense que probablement au cours des deux ou trois prochaines semaines nous déterminerons quels sont les pays qui ont la volonté politique de soutenir cette initiative et, ensuite, nous travaillerons directement avec les militaires pour identifier les capacités spécifiques qui soutiendront cette initiative », a expliqué mardi le général Joseph Dunford, le chef d’état-major interarmées américain.

Selon ce général, le plus haut gradé américain, Washington fournirait « la connaissance et la surveillance du domaine maritime ». La cinquième flotte américaine est stationnée à Bahreïn, mais les pétroliers seraient escortés par les nations sous le drapeau desquelles ils naviguent, comme l’a souhaité, en juin, le président Donald Trump. C’est toutefois une décision de ce même Donald Trump qui est la cause première de la situation actuelle, celle de se retirer de l’accord international nucléaire iranien signé en 2015, accusant Téhéran de déstabiliser la région.

Iran - Etats-Unis : pourquoi le détroit d’Ormuz est-il stratégique ?
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