Garth Ritchie, chef de la banque d’investissement, s’en va avec un parachute doré de 11 millions d’euros. Ici, le 24 mai 2018 à Francfort. / ARNE DEDERT / AFP

La douloureuse restructuration de Deutsche Bank, annoncée dimanche 7 juillet par Christian Sewing, son patron, pouvait difficilement partir sur de plus mauvaises bases. La première banque allemande, en difficulté depuis une décennie et empêtrée dans divers scandales financiers, se séparera de 18 000 salariés d’ici 2022, soit un cinquième des ses effectifs.

Les salariés ordinaires ne seront pas les seuls à faire les frais de cette réorganisation historique : Deutsche Bank congédie aussi trois membres de son directoire. Mais les conditions du départ de ces derniers, qui quitteront la banque dès la fin du mois, font grincer des dents. Garth Ritchie, chef de la banque d’investissement, Frank Strauss, patron de la clientèle privée, et Sylvie Mathérat, responsable de la conformité et du contrôle interne, se partageront à eux trois 26 millions d’euros d’indemnités de licenciement.

Garth Ritchie, ancien adjoint de Christian Sewing, se taille la part du lion : le Sud-Africain, arrivé à la tête de l’ancienne division vedette de Deutsche Bank en 2016, s’en va avec un parachute doré de 11 millions d’euros, bien qu’il n’ait pas atteint ses objectifs. La dirigeante française recevra pour sa part un pactole de 9 millions d’euros.

« Pillage »

Et ce n’est pas tout. Le quotidien britannique Financial Times a révélé mercredi 10 juillet que Deutsche Bank a déboursé le double de cette somme pour licencier sept dirigeants depuis le printemps 2018. Ces 52 millions incluent les indemnités à payer aux trois directeurs dont l’éviction vient d’être annoncée, mais aussi les 10,9 millions perçus par John Cryan, le prédécesseur de Christian Sewing, limogé en 2019 après trois années tumultueuses aux commandes de l’ancien fleuron bancaire allemand.

En payant ces sommes astronomiques à des cadres supérieurs évincés après une performance médiocre, Deutsche Bank ne fait qu’appliquer les clauses prévues par leurs contrats de travail respectifs. Mais ces révélations passent mal. « Ces contrats, c’est du gagnant-gagnant pour les cadres », s’émeut Gerhard Schick, directeur de l’ONG Bürgerbewegung Finanzwende.

« Lorsque tout va bien, ils gagnent des millions, et quand ça va mal, c’est pareil. Et des milliers de salariés vont perdre leur emploi ».

Des élus se sont joints au concert de critiques. Lothar Binding, député social-démocrate au Bundestag, dénonce un « pillage ».

Outre-Rhin, l’affaire a de quoi relancer le débat sur les rémunérations des patrons. En février 2017, c’était Volkswagen qui se retrouvait sur la sellette après avoir accordé un parachute doré de 13 millions d’euros à Christine Hohmann-Dennhardt, son ancienne directrice juridique, qui quittait le navire après seulement un an au directoire. En raison de la polémique, le constructeur, qui se serrait la ceinture pour surmonter le scandale des moteurs diesel, a décidé de limiter le salaire de ses dirigeants à 10 millions d’euros par an.