12e ÉTAPE, TOULOUSE - BAGNÈRES-DE-BIGORRE, 209 km

Bonjour les Pyrénées. / STEFANO RELLANDINI / REUTERS

L’heure est enfin à la haute montagne : le Tour 2019 franchit jeudi les 1 500 mètres d’altitude pour la première fois. Place aux décors majestueux des cols de Peyresourde et de la Hourquette d’Ancizan, place aux minces serpentins de bitume épousant l’immensité de pentes verdoyantes, place aux torrents, aux lacs et aux isards virevoltants se jouant des versants abrupts, pour le plus grand bonheur des hélicoptères de France Télévisions et des téléspectateurs-touristes japonais, sud-africains ou australiens.

Avant cela, les téléspectateurs japonais, sud-africains ou australiens, gavés de cathédrales gothiques et de châteaux de la Renaissance à longueur d’étapes, auront découvert l’art de la banlieue à la française. La 12e étape, départ de Toulouse, va mettre à l’honneur les grandes barres d’immeubles (et les bâtiments à taille plus humaine qui leur succèdent) de Bagatelle, quartier populaire dans l’ouest de la « ville rose » où la vie ne l’est pas toujours, et dont les faubourgs qui ont vu grandir le vice-champion olympique de boxe Sofiane Oumiha font de temps en temps l’actualité pour de mauvaises raisons.

Ils la font cette fois pour une excellente, en l’occurrence l’opiniâtreté des gamins de Médias Pitchounes, qui ont réussi à faire venir le Tour en bas de chez eux. Cette association du coin envoie depuis une dizaine d’années de jeunes adolescents jouer les reporters sur la Grande Boucle, et son projet intitulé « le Tour au pied des tours », voué à « favoriser la participation citoyenne de jeunes issus de quartiers populaires », va trouver un bel aboutissement jeudi matin.

« Que toutes les France soient mariées dans cet événement »

Lors de la 18e étape du Tour 2018, quelques envoyés spéciaux de Médias Pitchounes s’étaient trouvés plusieurs minutes face à Emanuel Macron, et avaient sollicité son soutien : « On veut que la magie du Tour de France vienne en bas de nos tours, lui avait dit Hayet, 17 ans, que les habitants de notre quartier, nos familles, connaissent la Grande Boucle pour toute sa magie. On veut mettre en avant notre quartier, montrer qu’il est très beau, qu’il y a de belles choses chez nous. On voudrait que Toulouse soit une ville départ du Tour, et qu’il parte du quartier. » « Banco, avait répondu Emmanuel Macron. C’est une très bonne idée que toutes les France soient ainsi mariées dans cet événement. »

Il a ensuite suffi que la ville de Toulouse se porte candidate, et le tour était joué, ou presque, puisque le rêve d’un départ à même le quartier a dû être oublié : « On voulait partir de Bagatelle mais on n’a pas pu le faire pour des contraintes techniques et logistiques », explique le directeur adjoint du Tour Pierre-Yves Thouault. Cela n’empêchera pas les gamins de Médias Pitchounes, interviewés ici par Libération, d’être aux anges : après s’être élancée du Stadium de Toulouse, à un kilomètre de là, l’étape sillonnera leur quartier et passera devant les locaux de leur association.

On ne verra pas un vélo sur la place du Capitole. La carte postale géante de la France qu’est la Grande Boucle s’apprête à représenter, le temps de quelques coups de pédale, un décor banlieusard que le Tour a tendance à contourner. « Bien sûr que c’est plus rare que le reste, je ne vais pas dire le contraire, convient Christian Prudhomme, mais ça existe. » Le directeur du Tour cite les arrivées dans des quartiers populaires de Valence, La Roche-sur-Yon et Roubaix en 2018, ou encore les deux départs depuis Tomblaine, en périphérie de Nancy, en 2012 et 2014.

« Et cette année, poursuit le patron du Tour, le premier rendez-vous dans un quartier, ce n’est pas Bagatelle, c’était Epernay », où Julian Alaphilippe, lors de la 3e étape, s’est emparé du maillot jaune au cœur du quartier de Bernon. C’était juste après, saisissant contraste, avoir emprunté la clinquante avenue de Champagne où s’alignent les sièges de toutes les grandes maisons, et qu’il avait dévalée à 50 km/h sous le regard de la bourgeoise locale qui assistait au spectacle une coupe à la main.

Bonjour Bagatelle (photo prise en 2012). / PASCAL PAVANI / AFP

Départ 11 h 50 ; arrivée vers 17 h 15.

A PART ÇA, deux ou trois choses sur la course.

La 11e étape a été remportée mercredi au sprint par Caleb Ewan, mais le frisson du jour est venu du bus de l’équipe Cofidis, au pied duquel Stéphane Rossetto, pour lequel notre affection grandit chaque jour, et qui avait encore tenté une échappée kamikaze, s’en est pris en des termes fleuris au Belge Aimé De Gendt, compagnon d’échappée qu’il accuse d’avoir joué perso. Vous connaissiez le concept de « ratagas », vous ?

Tour de France 2019 / Stéphane Rossetto : "Ça vaut rien ces mecs là"
Durée : 01:50

Second frisson de la 11e étape, cette collision entre le casque d’un sprinteur et le téléphone d’un spectateur. Bilan : deux victimes. Niccolo Bonifazio, bien placé, finit 12e. Le téléphone, mal placé, finit dieu sait où.

Enfin, si vous aimez le vélo et que vous êtes ce soir dans les environs de Pau, rendez-vous au cinéma Le Méliès, 6 rue Bargoin, à 20 heures, pour la projection d’un portrait de Davide Rebellin, 47 ans, toujours coureur : Il Vecchio Saggio, de Laurent Galinon et Nicolas Loth.

Le documentaire sera précédé du très beau court-métrage Dans Paris, consacré au dernier critérium cycliste de Paris intra-muros, sur le boulevard Edgar Quinet, dans le 14arrondissement.