Le patron de Plastic Omnium, Laurent Burelle, à Saint-Priest (métropole de Lyon), en mars 2017. / JEAN-PHILIPPE KSIAZEK / AFP

Dans une conjoncture automobile franchement morose, voici des résultats semestriels – les premiers de la saison pour les entreprises françaises du secteur – qui redonnent le moral aux investisseurs et, plus largement, à tous les professionnels de la voiture. Plastic Omnium (PO), le troisième équipementier de l’Hexagone en termes de chiffre d’affaires derrière Faurecia et Valeo, a présenté, vendredi 18 juillet, des résultats semestriels 2019 qui ont aussitôt déclenché le décollage de l’action du groupe à la Bourse de Paris (+ 11 % à la mi-journée).

Certes il y a une baisse – attendue –, par rapport au premier semestre 2018, du bénéfice (- 33 %, à 155 millions d’euros) et de la marge opérationnelle (6,6 % du chiffre d’affaires contre 10,2 % l’an passé), mais la croissance est bien au rendez-vous, avec une hausse du chiffre d’affaires de 21 %, à 4,6 milliards d’euros. Surtout, l’Ebitda – équivalent au résultat d’exploitation avant impôts, intérêts et amortissements – atteint les 511 millions d’euros, en augmentation de 12 %. Ce ratio financier est un assez bon indicateur de la création de richesse générée par une entreprise. Le résultat du jour laisse présager qu’il pourrait dépasser un milliard sur toute l’année 2019, un record pour la firme de Levallois-Perret (Hauts-de-Seine).

Le plus spectaculaire est évidemment que cette solidité se manifeste au moment où l’industrie automobile connaît une sérieuse récession mondiale. PO, spécialiste en particulier des réservoirs et des pare-chocs, connaît une meilleure croissance que celle du marché dans toutes les grandes régions du monde. Et cela est particulièrement vrai dans les deux plus grandes zones de ventes de voitures au monde : l’Amérique du Nord (PO y affiche des ventes en progression de 7 %, quand le marché décroît de 3 %), et la Chine (+ 13,5 points de différence entre les ventes de PO et l’évolution de la production locale).

L’un des secrets de la réussite de l’entreprise réside dans sa capacité à gagner de nouveaux contrats

« Nous aurons participé à 243 lancements de modèle dans le monde cette année, dont 105 en Chine, se félicite Laurent Burelle, le PDG de l’entreprise et figure de proue de la famille propriétaire. Les neuf nouveaux constructeurs qui se sont ajoutés à notre portefeuille de 92 clients dans le monde sont tous chinois. »

L’un des secrets de cette réussite réside donc dans la capacité à gagner de nouveaux contrats. « La clé, c’est notre réseau de 136 usines, ajoute M. Burelle. Nous sommes capables de répondre à un appel d’offres global partout dans le monde ». Illustration avec l’un de ses gros clients, Toyota : PO a été en mesure d’accompagner le lancement d’un nouveau pick-up du constructeur japonais parce que l’entreprise dispose de trois usines capables de sortir le même produit dans trois endroits aussi différents que l’Afrique du Sud, la Thaïlande et l’Argentine.

Capacité d’adaptation

La martingale anticrise de Plastic Omnium, c’est aussi sa capacité d’adaptation aux vents contraires de la conjoncture. Pour commencer, pas question de pécher par excès d’optimisme. « Les prévisionnistes ont tendance à nous raconter le temps d’hier, grommelle M. Burelle. En septembre de l’année dernière, au moment où ces experts nous annonçaient encore un second semestre 2018 positif, nous avons quand même lancé un plan d’économies. Nous avons bien fait : les six derniers mois de l’année se sont soldés par un - 4,4 %. » Pour l’ensemble de l’année 2019, alors que ces mêmes prévisionnistes anticipent une baisse du marché automobile de 3,8 %, PO préfère se fonder sur une estimation de - 4,5 %.

A partir du moment où les nuages se sont accumulés sur la croissance automobile, l’équipementier a ainsi mis en œuvre très rapidement un programme de réduction des coûts qui devrait générer 100 millions d’euros d’économies sur l’ensemble de 2019, dont 50 millions en frais de structure. Il entraîne une réduction de 500 emplois (sur 33 000 au total), les pays les plus touchés étant le Royaume-Uni et l’Allemagne.

« Nous avons encore investi en ce début d’année, souligne Laurent Burelle : six nouvelles usines, trois centres de recherche. Cela a pesé sur les comptes, et le plan d’économies a aidé à en atténuer l’impact. Mais les conséquences financières sont maintenant derrière nous. » Conséquence : PO anticipe un flux de trésorerie positif de 200 millions d’euros au second semestre, contre 30 millions au premier. De quoi, là encore, amortir les éventuels nouveaux chocs de la conjoncture.

Car, même avec ses atouts, Plastic Omnium affronte des turbulences. Des écueils persistent : un « Brexit dur » ou un regain de tensions dans la guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis. Parmi les récents investissements du français figurent les 200 millions de dollars (178 millions d’euros) dépensés pour accompagner le développement de l’usine américaine de BMW. Or, celle-ci exporte de gros SUV vers la Chine, qui sont maintenant taxés par Pékin en représailles à la hausse des droits de douane décidée par le président Trump.

Autre zone à risque : l’Allemagne. PO est moins bien parvenu à y compenser la baisse de production qu’ailleurs. Il faut dire que le groupe y est très exposé. A elles seules, les quatre marques phares de l’automobile allemande (Volkswagen, Audi, Mercedes, BMW) représentent un tiers de ses ventes.