Au siège de Nissan à Tokyo, le 12 février 2019. / Kim Kyung Hoon / REUTERS

Nissan s’apprêterait à supprimer 10 000 emplois dans le monde, soit plus de 7 % de ses effectifs. Selon plusieurs médias, dont les agences de presse Kyodo et Reuters, le constructeur japonais devrait faire cette annonce jeudi 25 juillet, dans la lignée de ses résultats pour le trimestre avril-juin. Les suppressions concerneraient principalement des usines peu profitables, en Amérique latine notamment. Le Japon pourrait ne pas être épargné, le groupe souhaitant y rationaliser la production. « Ces informations ne sont que des spéculations. Nous n’avons aucun commentaire à faire », a réagi Nissan, mercredi 24 juillet.

En mai, lors de la présentation de l’exercice annuel clos fin mars, le PDG, Hiroto Saikawa, avait promis des « réformes drastiques » devant se traduire par la suppression de 4 800 postes avec comme objectif de réduire les dépenses de 30 milliards de yens (248 millions d’euros). M. Saikawa, qui sera exceptionnellement présent jeudi pour la présentation des résultats trimestriels, normalement assurée par le responsable des finances, envisagerait donc d’en supprimer plus du double.

La réduction de postes, qui n’est pas sans rappeler les 20 000 licenciements décidés en 1999 par son dirigeant déchu, Carlos Ghosn, pour relancer Nissan, puis en 2009, toujours par M. Ghosn, à la suite de la crise financière de 2008, traduirait la volonté du constructeur d’améliorer la rentabilité tout en réduisant les coûts fixes.

Des difficultés exacerbées avec l’arrestation de Carlos Ghosn

Au terme de l’exercice 2018 clos fin mars, le partenaire de Renault et de Mitsubishi au sein de l’alliance automobile affichait un recul de 4,4 % de ses ventes, à 5,52 millions de véhicules. La chute a atteint 9,3 % aux Etats-Unis, son premier marché à l’export, et 14,9 % en Europe.

Conséquence, le constructeur a fini l’exercice avec un effondrement de 57,3 % de son bénéfice net, à 319 milliards de yens (2,5 milliards d’euros). Il n’avait jamais été si bas depuis la crise de 2008. Pour l’année fiscale en cours, Nissan attend un nouveau recul de ses profits, qui pourraient tomber à 170 milliards de yens.

Le constructeur a vu ses difficultés exacerbées avec l’arrestation, en novembre 2018, de Carlos Ghosn, aujourd’hui en liberté sous caution dans l’attente de son procès pour infractions à la législation financière et abus de confiance aggravé. Ce feuilleton judiciaire nuit à l’image du constructeur.

Nissan a choisi de réformer son fonctionnement

Pour en sortir et tourner la page des vingt années de l’ère Ghosn, Nissan a choisi de réformer son fonctionnement. Lors de son assemblée générale le 25 juin, présentée par M. Saikawa comme une « étape majeure » vers le redressement du groupe, les actionnaires ont approuvé une refonte de la gouvernance, avec la création de trois comités chargés des rémunérations, des nominations et de l’audit, et destinés à renforcer les contrôles internes.

M. Saikawa cherche également à sortir de la politique du chiffre suivie par le dirigeant déchu et qui s’est notamment traduite par un recours excessif, et finalement ruineux, aux rabais sur les prix pour gonfler les ventes, principalement aux Etats-Unis. L’augmentation des coûts liés aux investissements dans de nouvelles technologies comme la conduite autonome a également pesé sur les performances.

Le redressement se heurte toutefois aux divergences avec Renault, actionnaire à hauteur de 43,4 %. M. Saikawa, par ailleurs critiqué en interne pour sa proximité passée avec M. Ghosn, s’oppose à toute idée de fusion – un projet défendu par le constructeur français – et prône un rééquilibrage de l’alliance. Il a choisi de repousser les discussions sur l’avenir de l’alliance dans l’attente d’une amélioration des performances de Nissan. « Il faudrait être sourd ou aveugle pour ne pas comprendre que le redressement de Nissan est un sujet prioritaire », reconnaissait en juin Jean-Dominique Senard, président du conseil d’administration de Renault et aujourd’hui à la direction de l’alliance.