La nouvelle chef de file du LibDem, Jo Swinson, à Londres, le 22 juillet. / TOLGA AKMEN / AFP

Avant même de prendre ses fonctions de premier ministre, mercredi 24 juillet, Boris Johnson se présente comme une personnalité particulièrement clivante et controversée. Selon un sondage YouGov, 58 % des Britanniques ont une opinion défavorable de lui, tandis que 31 % le voient d’un bon œil. Ils sont 43 % à le trouver « sympathique », mais seuls 29 % pensent qu’il est « compétent » et 20 % qu’il est « honnête ».

La faiblesse des réactions de l’opposition à sa désignation est loin de refléter cette réalité. Le Parti travailliste, dont le chef, Jeremy Corbyn, est un eurosceptique de gauche, reste ambigu sur le Brexit. Mardi soir, il a souligné que M. Johnson avait été élu « par moins de 100 000 membres du parti conservateur non représentatifs en promettant des réductions d’impôts pour les riches, se présentant comme l’ami des banquiers et défendant un dangereux Brexit sans accord ». Mais il ne dénonce pas le Brexit en tant que tel, alors que les deux tiers de ses adhérents y sont opposés.

En outre, le Labour est empêtré dans des accusations de complaisance à l’égard de l’antisémitisme, qui mettent en cause des proches de M. Corbyn. Les travaillistes ont de surcroît essuyé un cuisant échec lors des élections européennes, où ils n’ont obtenu que 13,6 % des voix. Ses électeurs ont été siphonnés d’une part par le Parti du Brexit de Nigel Farage (europhobe ; extrême droite) arrivé en tête avec 30 % des voix, mais surtout par le Parti des démocrates libéraux (LibDem), ouvertement proeuropéen, dont le score de 19,6 % traduit la renaissance.

Les lib-dem, déconsidérés dans l’opinion depuis leur participation au gouvernement de coalition avec David Cameron (2010-2015) et à sa terrible politique d’austérité dans la foulée de la crise financière de 2008, reprennent des couleurs dans le contexte du Brexit, auquel ils sont les seuls, avec les Verts et les indépendantistes écossais, à s’opposer nettement. « Bollocks to Brexit » (littéralement « Brexit mes couilles ») est le slogan imagé qu’ils ont choisi pour bien se faire comprendre.

Proximité Johnson-Trump

Moins fracassante que la compétition pour la direction des tories, l’élection du nouveau chef de file des lib-dem a connu son dénouement lundi 22 juillet. Jo Swinson, une dynamique députée écossaise de 39 ans, a été désignée par les adhérents en remplacement de Vince Cable, 79 ans. En septembre 2018, elle avait fait parler d’elle en siégeant à la Chambre des communes avec son bébé, afin d’illustrer la possibilité de conjuguer travail et enfants.

Sitôt élue, lundi, elle a déclaré : « Face au nationalisme, au populisme et à la catastrophe du Brexit, les deux partis [conservateurs et travaillistes] ont échoué. Je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour stopper le Brexit. » Dénonçant la proximité entre Boris Johnson et le président américain, Donald Trump, ainsi que l’influence de Nigel Farage, Mme Swinson a ajouté : « Boris Johnson est plus occupé à lécher les bottes de Donald Trump qu’à défendre les valeurs britanniques d’honnêteté, de tolérance et de respect. » Elle a appelé les élus tories et Labour désireux de « stopper le Brexit, Johnson et Corbyn » à rejoindre les lib-dem.

Le parti centriste, devenu un refuge pour les électeurs travaillistes exaspérés par les silences du Labour sur le Brexit, ambitionne d’attirer aussi des députés pour étoffer son groupe actuel, qui n’en comprend que onze. Il a aussi bénéficié de l’échec de Change UK, le groupe de députés proeuropéens qui ont fait défection les uns aux travaillistes et les autres aux conservateurs. Chuka Umunna, ancienne figure du Labour et cofondateur de Change UK, a ainsi récemment rallié les lib-dem.