Le premier ministre irlandais Leo Varadkar / Yves Herman / REUTERS

Dans la perspective d’un Brexit sans accord, que n’exclut pas le nouveau premier ministre britannique, Boris Johnson, l’Irlande multiplie les mises en garde. Le pays, doté d’une frontière terrestre avec le Royaume-Uni et sa province d’Irlande du Nord, veut conserver la libre circulation après le Brexit et craint des retombées négatives pour son économie en cas de retour à une frontière terrestre entre les deux parties de l’île.

Le premier ministre irlandais, Leo Varadkar, a été le premier à réagir au discours de Boris Johnson après sa prise de fonctions mercredi. Il a ainsi affirmé que son objectif déclaré de renégocier d’ici au 31 octobre l’accord de Brexit conclu entre Theresa May et Bruxelles, était « totalement déconnecté du monde réel ». Leo Varadkar a aussi estimé qu’un Brexit sans accord pourrait mener à une réunification de l’Irlande et mettre à mal le Royaume-Uni. « L’une des choses qui pourrait vraiment nuire (au Royaume-Uni), paradoxalement, c’est un Brexit dur, tant pour l’Irlande du Nord que pour l’Ecosse », a-t-il déclaré.

Boris Johnson réclame de l’Europe un nouvel accord de divorce avec « l’abolition » du « filet de sécurité » irlandais, une demande jugée « inacceptable » par le négociateur de l’UE Michel Barnier. Ce « filet de sécurité », auquel tient Leo Varadkar, vise à éviter après le Brexit le retour de contrôles à la frontière entre l’Irlande du Nord et la République d’Irlande.

« Des gens que l’on pourrait qualifier de nationalistes modérés ou de catholiques modérés, qui se satisfaisaient plus ou moins du statu quo, regarderont davantage vers une Irlande unifiée », dans l’espoir de rester dans l’UE, a-t-il mis en garde. « Et de plus en plus, vous verrez des protestants libéraux, des unionistes libéraux commencer à se demander où ils se sentent le plus chez eux, a encore dit Leo Varadkar. Est-ce dans un Royaume-Uni nationaliste qui discute de rétablir éventuellement la peine de mort et ce genre de choses ? Ou bien est-ce dans la maison commune européenne et l’Irlande ? »

En 1988, la signature de l’accord du « Vendredi saint » avait mis fin à trois décennies de « troubles » en Irlande du Nord, des violences opposant des républicains nationalistes (catholiques), partisans de la réunification de l’Irlande, et loyalistes unionistes (protestants), défenseurs du maintien dans la Couronne britannique. L’Irlande redoute qu’en cas de sortie sans accord de l’UE, la réapparition d’une frontière terrestre et de contrôles entre l’Irlande du Nord et la République d’Irlande provoque une résurgence des violences.