Voix d’orientation. Le Monde Campus et La Zone d’Expression Prioritaire, média participatif, s’associent pour faire témoigner des jeunes sur leurs études et leurs parcours d’orientation. Ce sont eux qui rédigent, dans le cadre d’ateliers d’écriture encadrés par des journalistes, leur récit. Aujourd’hui, Allan, 26 ans, raconte comment son échange universitaire en Finlande a changé le cours de sa vie.

Allan, 26 ans, a décidé de poursuivre ses études à la faveur d’un échange universitaire en Finlande.

Après avoir obtenu mon bac ES à Châteauroux, je me suis inscrit en licence de gestion à l’université de La Rochelle. Deux années d’études plus tard, mon enthousiasme et ma curiosité initiales avaient disparu. Sur les cent cinquante étudiants du départ, nous n’étions plus que quarante survivants de cet « Hunger Game ».

Je pensais qu’on serait pris pour des adultes ; l’appel en début de cours, la tolérance zéro pour les absences et le rapport hiérarchique en béton armé ont eu raison de cette fausse promesse.

J’ai vu une prof refuser d’assister un étudiant avant un examen parce qu’il était « trop tard »

Parmi les moments marquants, je me rappelle d’un prof survolté, qui réprimandait une étudiante, en pleurs, paniquée à l’idée de ne pas réussir à présenter oralement dans une autre langue. Je me souviens d’une amie laissée à son propre sort pour trouver son stage, l’administration refusant de l’aider sous prétexte que ce n’était pas leur problème si elle ne validait pas son année. J’ai même vu une prof refuser d’assister un étudiant avant un examen parce qu’il était « trop tard ».

Malgré le fait d’avoir toujours été appuyé par ma famille pour poursuivre mes études jusqu’en master, cette idée commençait à me décourager. J’ai alors tenté le tout pour le tout : pourquoi ne pas partir dans le cadre d’Erasmus, et finir ma licence dans une université ailleurs ? Quelques heures après le Nouvel An, j’étais sur le chemin de Lappeenranta, en Finlande, avide de changement, et content de pouvoir vérifier si ces rumeurs à propos de l’éducation scandinave étaient fondées. Après tout, s’il existait un remède à ma perte d’espoir dans l’enseignement supérieur, cela ne pouvait être qu’au nord, sous la neige, dans le blizzard.

Des profs « détendus et avenants »

Ce nouveau système m’a fait découvrir un autre monde. Les profs, détendus et avenants, nous demandaient de les appeler par leur prénom, engageaient des discussions avec les étudiants d’égal à égal, apprenaient eux-mêmes de leurs interactions avec les jeunes. Ils mettaient en place des travaux de groupe dans lesquels ils endossaient un rôle de facilitateur, plutôt que de juge. Ils n’hésitaient pas à complimenter le propos ou la question d’un étudiant, soulignaient les forces de chacun, restaient parfois après les cours pour aider certains. Révolutionnaire !

Six mois en Finlande ont suffi à guérir ma perte d’espoir

Le résultat en valait la peine. Les étudiants étaient investis, déterminés, curieux, et courageux. Six mois en Finlande ont suffi à effacer une négativité qui s’était accumulée sur plusieurs années, et à guérir ma perte d’espoir.

J’ai donc décidé de poursuivre en master ! Mais seulement dans ces conditions. J’ai renoncé à rentrer en France, au fromage, aux pains au chocolat, à la langue française, à vivre près de ma famille et mes amis. J’ai soumis ma candidature auprès de différentes universités, toutes localisées en Scandinavie.

Quelques mois plus tard, l’université de Göteborg, en Suède, m’accueillait pour un master en business international, une expérience qui a confirmé les découvertes mentionnées plus tôt : engagement des profs, travaux de groupe, encouragements, compliments et critiques constructives… Deux ans plus tard, après beaucoup d’efforts pour apprendre le suédois et m’intégrer, me voilà toujours en Suède, une compagne à mes côtés, et un travail qui m’envoie partout dans le monde en tant que consultant en stratégie d’entreprises, trouvé six mois après obtention du diplôme.

L’ironie de cette histoire, c’est que je n’aurais jamais découvert la Finlande et la Suède si la France ne m’avait pas poussé à aller trouver mieux ailleurs. Pour cela, je devrais être reconnaissant. Mais peut-être que le système éducatif français devrait penser à appliquer l’exemple scandinave au lieu de seulement le citer à répétition.

La zone d’expression prioritaire (ZEP) est un dispositif d’accompagnement à l’expression des jeunes de 15 à 25 ans par des journalistes professionnels. / ZEP

La Zone d’expression prioritaire (ZEP) accompagne la prise de parole des jeunes

La Zone d’expression prioritaire (ZEP) est un dispositif d’accompagnement à l’expression des jeunes, dans le cadre d’ateliers d’écriture animés par des journalistes professionnels. Organisés dans des lycées, universités, associations étudiantes ou dans des structures d’insertion, ces jeunes écrivent leur quotidien et leurs questionnements.

Tous leurs récits sont à retrouver sur Le Monde Campus et sur la-zep.fr.