L’ex-président kirghiz Almazbek Atambaïev, accusé de corruption et placé en détention la semaine dernière après une interpellation musclée, préparait un coup d’Etat, a affirmé mardi 13 août le chef des services de sécurité de ce pays d’Asie centrale. « Son intention était un coup d’Etat. Je le dis officiellement », a déclaré Orozbek Opoumbaïev, chef du service national de sécurité du Kirghizstan (GKNB), lors d’une conférence de presse à Bichkek, la capitale kirghize.

Almazbek Atambaïev, chef d’Etat de 2011 à 2017, a été placé en détention vendredi dernier jusqu’au 26 août à l’issue de deux assauts des forces spéciales marqués par des violences qui ont accompagné sa spectaculaire arrestation. Celle-ci a mobilisé près de 2 000 policiers, dont le ministre de l’intérieur en personne, causant la mort d’un membre des forces spéciales et fait une centaine de blessés – un millier de partisans de M. Atambaïev défendant, face aux policiers, la résidence de l’ancien président.

De poulain à rival

Accusé initialement de corruption, M. Atambaïev, 62 ans, a dénoncé ces accusations comme « absurdes » et a annoncé son intention de ne pas se laisser faire, se disant prêt à « rester debout jusqu’à la fin ». En conflit avec son successeur et rival, il a vu son immunité d’ancien président de la République levée par les députés et est inculpé pour corruption. M. Atambaïev est soupçonné d’acquisition illégale de terres et d’avoir fait libérer un membre d’un clan mafieux. Accusations qu’il conteste et attribue à une manœuvre politique du nouveau président, Sooronbaï Jeenbekov.

A la fin de son mandat, Almazbek Atambaïev avait réussi au prix de manœuvres politiques à imposer la candidature de Sooronbaï Jeenbekov, alors son poulain. Mais leurs relations se sont rapidement dégradées. Une arrestation de M. Atambaïev pourrait provoquer de graves troubles dans cette ex-République soviétique d’Asie centrale, secouée par deux révolutions, en 2005 et 2010, et victime de fréquentes tensions ethniques.

Crises récurrentes

Almazbek Atambaïev avait notamment critiqué plusieurs nominations effectuées par Sooronbaï Jeenbekov. De son côté, M. Jeenbekov a démis de leurs fonctions plusieurs hauts fonctionnaires proches de l’ancien président.

Almazbek Atambaïev s’était rendu en juin en Russie, pays allié du Kirghizistan, pour un entretien avec Vladimir Poutine. Le président russe s’était alors inquiété de possibles troubles, prônant la stabilité politique dans un pays théâtre de crises récurrentes où la géographie entre en ligne de compte. Almazbek Atambaïev est originaire du nord du Kirghizistan, urbanisé et relativement prospère, tandis que Sooronbaï Jeenbekov vient du sud du pays, pauvre, plus rural et où vivent d’importantes minorités ouzbèkes et tadjikes.