Le montant est historique. Les 1 200 plus grandes entreprises cotées mondiales ont versé, pour la période avril-juin, quelque 513,8 milliards de dollars (463 milliards d’euros) de dividendes à leurs actionnaires, soit une progression de 1,1 %, selon l’étude publiée, lundi 19 août, par l’observatoire de la société de gestion Janus Henderson.

Sur l’ensemble de 2019, ces groupes devraient distribuer à leurs actionnaires un montant record, estimé à 1 430 milliards de dollars. Reste que le deuxième trimestre est particulièrement significatif, car sept sociétés sur dix versent leurs dividendes à cette période de l’année.

« Ce niveau reflète d’excellents résultats financiers en 2018, analyse Ben Lofthouse, responsable des gestions actions chez Janus Henderson. Cependant, on observe un ralentissement de la croissance des dividendes, qui peut s’expliquer par une plus grande prudence des entreprises avec la décélération de l’économie mondiale. »

« L’heure de la stabilisation »

L’an dernier, les dividendes avaient fait un bond de 14,3 % sur ce même deuxième trimestre. « Après la crise, les entreprises ont d’abord amélioré leurs résultats financiers. Puis, dans un second temps, cela s’est traduit par le versement des dividendes, ce qui explique les fortes croissances, rappelle M. Lofthouse. Aujourd’hui, c’est l’heure de la stabilisation, même si c’est bien plus fort que l’inflation. »

Les sociétés sont particulièrement prudentes sur le Vieux Continent. Les dividendes y ont même chuté de 5,3 % sur ce trimestre. « La croissance de l’Europe a été à la traîne par rapport au reste du monde au cours des dernières années (…), du fait, notamment, de la faiblesse de l’euro », relève l’observatoire. Tous les pays européens ne sont néanmoins pas logés à la même enseigne.

La France a connu une croissance de 3,1 %. « De loin, le plus grand payeur de dividendes en Europe, elle a vu leurs montants atteindre 51 milliards de dollars au cours du deuxième trimestre, un nouveau niveau historique », assure l’étude. Les trois quarts des sociétés françaises prises en compte par l’étude ont augmenté leurs versements par rapport à l’an dernier. Seul EDF les a baissés.

« Au détriment des salaires »

Pour Pascal Quiry, professeur à HEC et coauteur du Vernimmen, la bible de la finance d’entreprise, ce n’est pas une surprise : « La capitalisation des grandes entreprises françaises est bien supérieure à celles des allemandes, en Europe. De ce fait, il n’est pas étonnant qu’elles dégagent, en volume, le plus de dividendes. »

Parmi les groupes les plus généreux figurent Total, Sanofi, BNP Paribas, LVMH, Hermès, Kering ou L’Oréal. Selon La Lettre Vernimmen, les entreprises du CAC 40 ont reversé, en 2018, 46 % de leurs bénéfices à leurs actionnaires, sans pour autant renoncer à leurs investissements.

En revanche, en Allemagne, les dividendes ont chuté de 10,7 %. Les groupes automobiles ou chimiques ont vu leurs activités pénalisées par les guerres commerciales ou les scandales sanitaires.

Ces données font grincer les organisations altermondialistes qui participent, cette semaine, au « contre-sommet » du G7. Elles illustrent « les politiques qu’il faut transformer aujourd’hui pour financer l’intérêt général plutôt que rémunérer les actionnaires », a confié à l’AFP Maxime Combes, membre d’Attac. « Les pays du G7 mettent en place des politiques qui favorisent le versement de dividendes, notamment au détriment des salaires », déplore, pour sa part, Quentin Parrinello, de l’association Oxfam France.